Écriture cursive ou écriture scripte, telle est la question!

Disparue du curriculum de l’Ontario

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Disparue du curriculum de l’Ontario, l'écriture cursive offrirait des avantages non-négligeables, dont des textes plus clairs, une meilleure orthographe et une syntaxe plus conforme aux règles.
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Publié 03/09/2019 par Michèle Villegas-Kerlinger

C’est le premier jour des classes à l’école secondaire. Les élèves de 9e année entrent dans la salle avec leur sac à dos, bavardant de leur été et de la nouvelle année scolaire qui commence. Le professeur les salue les uns après les autres et les invite à s’asseoir. Suivent les présentations de circonstance, les attentes de l’enseignant et les détails du cours. Puis, le professeur commence à écrire en écriture cursive des notes au tableau, mais, à sa grande surprise, personne ne les copie. L’enseignant regarde la classe d’un air réprobateur et lui rappelle que les notes sont un facteur important pour la réussite à l’école.

Un garçon, un peu plus courageux que les autres, lève la main et confirme le soupçon du professeur: aucun des élèves ne peut lire l’écriture au tableau puisqu’aucun n’a appris à lire ni à écrire en lettres attachées.

Quelle importance?

On peut se demander quelle est l’importance de nos jours d’enseigner l’écriture cursive, aussi appelée «écriture manuscrite» ou «lettres attachées».

Après tout, bien des pays, dont les États-Unis et la Finlande, n’enseignent plus que l’écriture scripte, qu’on appelle aussi «lettres détachées», «lettres moulées» ou «lettres d’imprimerie». Par ailleurs, presque tous les textes imprimés et numérisés sont écrits en écriture scripte.

Les avantages de l’écriture cursive

Ce que peu de gens savent, c’est que les avantages à apprendre l’écriture cursive sont réels et très nombreux.

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C’est le code strict de cette forme d’écriture qui le veut. Grâce aux lettres attachées, l’élève est moins enclin à faire des lettres miroirs comme «b» et «d», «p» et «q», «u» et «n» et même «n» et «h».

Les espaces entre les mots sont beaucoup plus évidents et il y a moins d’erreurs entre les lettres minuscules et les majuscules.

Plus difficile au début

Si, au début, l’écriture cursive est plus difficile à maîtriser que l’écriture scripte, une fois les gestes automatisés, l’orthographe et la connaissance des règles de grammaire, ou «la syntaxe», des élèves qui l’ont apprise sont nettement meilleures que celles des élèves n’ayant appris que l’écriture scripte.

Par ailleurs, les textes écrits par ceux-là sont plus longs et de meilleure qualité que les textes produits par ceux-ci.

Comme l’accent est mis sur le mot et pas sur la lettre, l’écriture cursive permet de mieux comprendre le concept du mot, ce qui peut faciliter l’apprentissage de la lecture.

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Le peu de levers de crayon, ce qu’on appelle «l’enchaînement des gestes», permet à l’enfant d’écrire plus vite et rend plus fluide le mouvement graphomoteur, ce qui aide l’élève à ne pas perdre le fil de ses idées.

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Quelques avantages de l’écriture scripte…

Quels sont les avantages de l’écriture scripte? Tout d’abord, elle est plus facile à apprendre que l’écriture manuscrite. Par conséquent, l’enfant acquiert une écriture fonctionnelle plus vite.

De plus, cette simplicité graphomotrice permet à l’enfant des pauses entre les lettres pour planifier la lettre suivante grâce aux nombreux levers de crayon.

En fait, l’écriture scripte, de par son mouvement moins complexe et son code plus souple, s’apparente beaucoup au dessin. Les élèves reproduisent les lettres telles quelles sans avoir forcément à suivre une démarche précise, ce qui n’est pas possible dans le cas de l’écriture cursive.

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… et plusieurs inconvénients

Malgré leurs atouts, les lettres détachées présentent, de nombreux inconvénients.

Comme l’accent est mis sur chaque lettre au lieu de chaque mot, l’enfant aura de moins bonnes connaissances de l’orthographe et de la syntaxe.

L’espacement entre les lettres et les mots peut rendre plus difficile la lecture d’un texte écrit en écriture scripte et les lettres miroirs sont plus fréquentes.

De plus, les lettres détachées sont plus lentes et plus énergivores à produire que les lettres attachées en raison de tous les levers de crayon, ce qui peut retarder l’automatisation du geste d’écrire.

Les quatre opérations de l’écriture

En effet, écrire est plus complexe qu’elle n’en a l’air à première vue et se divise en quatre opérations distinctes:

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• conceptualiser (choisir et organiser ses idées pour répondre à une intention et s’adresser à ses lecteurs);

• énoncer (développer ses idées dans un discours en faisant des choix syntaxiques et lexicaux);

• encoder (mettre en forme ce discours en respectant l’orthographe lexical et syntaxique);

• matérialiser (l’acte d’écrire).

La graphomotricité (la psychomotricité, ou «fonction motrice en lien avec la pensée, la psychologie et les fonctions cérébrales», appliquée à l’acte d’écrire) fait partie de ce dernier point auquel les trois autres opérations sont subordonnées.

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Automatiser le geste d’écrire

Si l’élève doit se concentrer trop sur le geste graphomoteur, c’est-à-dire la formation de ses lettres, il fera moins attention aux trois autres tâches.

D’où l’importance de l’automatisation du geste d’écrire car elle permet à l’élève de se concentrer sur les trois autres opérations de l’écriture qui englobent l’organisation, la créativité, l’orthographe, la syntaxe, la conjugaison des verbes et ainsi de suite.

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Les obstacles à éviter à tout prix

Selon les experts, ce qu’il faut éviter à tout prix, c’est le double apprentissage ou l’apprentissage du deuxième système avant la maîtrise du premier.

Au Québec comme dans de nombreux pays, l’écriture scripte est enseignée en 1re année et l’écriture cursive à partir de la 2e. C’est que chacun des deux systèmes d’écriture nécessite l’apprentissage et l’automatisation des patrons moteurs des lettres, à savoir «la mémoire musculaire».

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L’introduction trop hâtive d’un deuxième système peut confondre l’enfant qui, n’ayant pas encore maîtrisé les gestes graphomoteurs du premier, aura du mal à se concentrer sur les trois autres opérations de l’écriture.

Depuis l’Égypte ancienne

Si l’écriture cursive est boudée de nos jours, il faut préciser qu’elle est beaucoup plus ancienne que l’écriture scripte et a eu la cote pendant de nombreux siècles auprès des plus grandes civilisations de l’humanité.

Née dans l’Égypte ancienne, elle a fait son apparition en Occident au 14e siècle. Grâce à sa rapidité d’exécution, elle est capable de soutenir la continuité de la pensée. On la considère comme l’écriture pratique par excellence.

L’écriture scripte en 1916 seulement

L’écriture scripte est beaucoup plus récente. Sa création daterait de 1916, année où le calligraphe et typographe britannique Edward Johnston l’a inventée.

C’est dans les années 1970 que son enseignement a été introduit au Québec parce que l’on croyait qu’il faciliterait la lecture, supposition qui s’est révélée fausse après coup.

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En fait, les résultats en lecture sont assez similaires qu’on ait appris l’écriture cursive ou la scripte. Des images cérébrales montrent que des zones du cerveau similaires s’activent pendant la lecture et l’écriture, peu importe la forme des lettres.

Controverses ici et ailleurs

Le choix entre les deux systèmes d’écriture fait l’objet d’une vive polémique non seulement au Canada, mais ailleurs dans le monde:

En 2013, 45 états américains ont aboli l’enseignement de l’écriture en lettres attachées; avant, les élèves américains apprenaient les lettres détachées en 1re année et les attachées en 3e ou 4e année.

Au Mexique, on n’enseigne plus que l’écriture scripte.

La Finlande a aboli l’écriture cursive en 2015.

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En Ontario, l’enseignement des lettres attachées n’est plus obligatoire depuis 2006.

Si, au Québec, on enseigne l’écriture cursive à partir de la deuxième année, de plus en plus d’écoles choisissent de n’enseigner que la cursive à partir de la 1re année.

En France, en Belgique et en Suisse, les enfants apprennent à écrire en lettres attachées dès l’âge de 4 ans.

Le conseil scolaire Viamonde en Ontario a choisi de n’enseigner que la cursive à partir de septembre 2016.

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Signer son nom

Étant donné sa longue histoire et les nombreux avantages de l’écriture cursive, on peut se demander pourquoi elle ne fait plus partie intégrante du curriculum de l’Ontario.

Est-ce parce que les lettres attachées sont plus difficiles à apprendre que les lettres détachées? Le ministère de l’Éducation n’en voit-il plus l’utilité? Et si nos élèves n’apprennent pas l’écriture cursive, seront-ils capables de bien écrire? De signer leur nom?

En résumant tout ce qui précède, on pourrait dire que l’écriture scripte offre quelques avantages intéressants à court terme en raison de sa relative simplicité.

Mais l’écriture cursive offre, à court et à long terme, des avantages non-négligeables, dont des textes plus clairs, une meilleure orthographe et une syntaxe plus conforme aux règles.

Auteur

  • Michèle Villegas-Kerlinger

    Chroniqueuse sur la langue française et l'éducation à l-express.ca, Michèle Villegas-Kerlinger est professeure et traductrice. D'origine franco-américaine, elle est titulaire d'un BA en français avec une spécialisation en anthropologie et linguistique. Elle s'intéresse depuis longtemps à la Nouvelle-France et tient à préserver et à promouvoir la Francophonie en Amérique du Nord.

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