Un roman où amour et haine sont très proches

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Publié 13/04/2010 par Paul-François Sylvestre

L’an passé Micheline Duff nous offrait le premier tome de la trilogie Au bout de l’exil. Le deuxième tome s’intitule Les Méandres du destin et est déjà en librairie. La romancière s’avère encore une fois une fine raconteuse. Elle exploite et l’amour et la haine dans ce récit tantôt romanesque tantôt historique.

Rappelons qu’Au bout de l’exil met en scène un Québécois qui cherche à refaire sa vie après le décès de son épouse.

Il part avec ses trois filles pour la Nouvelle-Angleterre vers 1880. Le rêve de Joseph Laurin se transforme en illusion, en petite misère et en déchéance.

Le tome 2 débute au moment où deux des filles Laurin commencent à travailler et à s’éveiller à l’amour.

Marguerite et Anne tentent de se bâtir une place au soleil. Rencontreront-elles des princes charmants pour leur donner la main sur le chemin de l’émancipation?

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Le prince charmant que Marguerite rencontre n’est nul autre que… le vicaire de la paroisse Saint-Joseph de Lowell (Massachusetts). La relation est évidemment complexe et compliquée; elle est même truffée de rebondissements inattendus. Tant et si bien que le destin, au fil de ses méandres mystérieux, oblige Marguerite à revenir au Québec.

Dans ce deuxième tome de la trilogie Au bout de l’exil, les personnages, toujours aussi attachants, entraînent le lecteur dans des situations où se mêlent des passions et des émotions troublantes et subtiles qui le tiendront en haleine jusqu’à la dernière page. Il y a bien l’espoir d’un jour meilleur, ma la lueur paraît souvent faible dans la noirceur de l’horizon des filles Laurin.

Dans ce deuxième tome, la romancière souligne avec force l’emprise de l’Église catholique, de «toute cette trâlée de vieux évêques et de curés miteux [qui] ne comprennent rien à la vie des femmes. Et ils se permettent, du fond de leur confessionnal, de tout décider pour nous et nous dire quoi faire jusque dans notre lit».

Pas étonnant qu’il soit souvent question de péchés – capital, originel, mortel, véniel – et de «la crainte de Dieu».

La recherche qui sous-tend ce roman est bien menée et révèle parfois des facettes peu connues de l’histoire des «Petits Canadas» de la Nouvelle-Angleterre.

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À titre d’exemple, on apprend qu’un mouvement mené par Calvin Almaron cherchait à convertir les Canadiens français au protestantisme et à les envoyer à «l’école publique au détriment de l’école paroissiale pour tenter d’assimiler ces immigrants francophones peu coopératifs qui faisaient peser une menace sur la vie publique des États-Unis».

Sur le plan de la trame romanesque, Micheline Duff exploite avec doigté l’éternelle question du manque de communication. Les nouvelles et les secrets se transmettent parfois dans le désordre le plus total.

Il en résulte des hauts cris: quel menteur! quel profiteur! quel monstre! L’auteure exploite aussi le côté scabreux des relations hommes-femmes: abus, grossièretés, obscénités, domination, exploitation.

Peu de lecteurs remarqueront le clin d’œil que Micheline Duff lance à Micheline Lachance. Voici comment cela se produit. Lorsque Marguerite se dirige vers une maison qui accueille les filles-mères à Montréal; elle aboutit à la Maternité Sainte-Pélagie, lieu d’action du roman Les Filles tombées de Micheline Lachance. Belle trouvaille!

Le tome 2 d’Au bout de l’exil est un roman poignant avec en toile de fond l’authentique histoire de tous ces émigrés canadiens-français qui tentaient désespérément de sauvegarder leurs valeurs, dans la Nouvelle-Angleterre des années 1880-1890.
C’est à suivre, car on sait déjà que le tome 3 s’appellera L’Insoutenable Vérité.

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Micheline Duff, Au bout de l’exil, tome 2, Les Méandres du destin, roman, Montréal, Éditions Québec Amérique, 2010, 304 pages, 24,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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