Un roman où l’improbable et l’impossible sont vrais

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Publié 11/11/2008 par Paul-François Sylvestre

Auteure d’une vingtaine de romans, Andrea H. Japp est considérée comme l’une des «reines du crime». Elle vient de publier La Croix de perdition, un thriller médiéval haletant, tissé avec son habituelle virtuosité.

L’action de ce roman se situe entre 1209 et 1309, principalement durant l’hiver de 1308, dans l’abbaye des Clairets qui est coupée du monde extérieur par une terrible tempête de neige. La mère abbesse n’a que 16 ans mais ne manque pas de sang-froid. Il lui faut des nerfs d’acier car son abbaye est le théâtre d’une série de meurtres. Des moniales sont assassinées et tous les crimes sont commis selon une mise en scène macabre qui renvoie aux cartes du Tarot.

Comme Les dix petits nègres d’Agatha Christie, La Croix de Perdition est construit sur le modèle du huis clos. Juste avant le premier meurtre, un envoyé du pape est arrivé pour évaluer la présence de simples d’esprit. Une nouvelle sœur s’est aussi présentée pour remplacer l’apothicaire qui s’était fait passer pour une femme. Outre les douze moniales et ces deux hommes, le huis clos inclut quatre pauvres hères venus chercher l’hospitalité.

Dès le premier meurtre, une moniale affirme que ni un homme, ni une femme, ni une puissance des Ténèbres a pu commettre un tel crime. On lui répond: «Lorsque les possibilités les plus vraisemblables sont épuisées, c’est que l’improbable, voire l’impossible, est vrai.» Et pour ajouter au climat déjà tendu, l’auteure écrit que les forêts autour de l’abbaye sont infestés de loups, d’ours et de «prédateurs à deux pattes tout aussi redoutables, sinon plus».

La Croix de perdition est un titre qui renvoie au sac de Béziers (1209) et à une croix volée. Cent ans plus tard, elle est férocement recherchée car une véritable immortalité et un absolu pouvoir accompagnent cette croix. Se trouverait-elle à l’abbaye des Clairets? Des indices y seraient-ils cachés? Chose certaine, lorsque la nuit tombe, des choses étranges se passent. Durant ces heures entre chien et loup, «les contours de la réalité se diluent, se fondent pour produire des ombres parfois grotesques, parfois inquiétantes».

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À en croire ce thriller médiéval, «nous sommes le fruit de nos erreurs, du moins pour ceux d’entre nous qui les reconnaissent». De plus, il est facile de mener une vie tissée d’un confortable mensonge que nous ressassons jusqu’à nous convaincre de sa véracité.

Andrea Japp excelle dans l’art d’analyser le comportement humain et de le décrire en phrases lapidaires qui prennent parfois la forme de sentences ou de maximes. La romancière écrit, par exemple, qu’«il est bien fol de souhaiter évaluer la passion à l’aune de la raison». Elle voit la mort qui avance à visage découvert, «éternel vainqueur des existences humaines». Elle note qu’«il est absurde de fixer le futur en le sculptant dans le passé». Et l’auteure de se poser la question suivante: «Serions-nous parfois forts si nous n’étions pas souvent vulnérables?»

Andrea H. Japp, La Croix de perdition, roman, Paris, Éditions Calmann-Lévy, 2008, 366 pages, 34,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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