Un nouveau genre littéraire avec les visionèmes d’Hédi Bouraoui

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Publié 27/01/2009 par Suzette Dulac

Visionèmes? Ne cherchez pas, ce mot n’est probablement pas encore répertorié dans les dictionnaires, mais c’est ainsi qu’Hédi Bouraoui définit son tout dernier recueil bilingue Visages du dedans/In-side Faces.

Dans ce recueil, qui est en fait un livre d’art, on a le plaisir d’admirer quarante peintures de Micheline Montgomery, une artiste-peintre de Toronto. Les peintures, aux chaudes couleurs méditerranéennes, représentent surtout des visages et Hédi Bouraoui a voulu capter les pensées intimes de ces visages en leur donnant une voix.

Dès les premières pages, le lecteur est plongé dans un univers visuel et sonore. Le visage de «L’Écrivain» figé sous le pinceau de Micheline Montgomery se métamorphose sous la plume d’Hédi Bouraoui. Le poète réussit avec brio à pénétrer la conscience du personnage et nous faire entendre son monologue intérieur: «…J’écris pour m’ouvrir les yeux sur moi…/sur Autrui…sur l’Univers qui fuit…/Pour la goutte d’amour qui métamorphosera/Tout/En zébrures de non-dits».

À travers ces visionèmes, un univers autre que celui que l’on regarde se greffe à l’image. L’art devient polymorphe et on a l’impression que l’art de peindre et l’art d’écrire dialoguent, que les sons et les couleurs se répondent. Comme le souligne l’auteur dans son avant-propos, les visionèmes représentent: «une sorte de mariage entre la physiologie de l’art visuel et celle de la littérature».

En insérant de nombreuses références littéraires, en utilisant des outils poétiques travaillés avec soin et par le truchement du «je», l’âme de chaque personnage nous est dévoilée dans un un lyrisme omniprésent: «…Heureux qui comme la bibliothécaire a fait un beau voyage/Dans les esprits, rapportant une Toison d’or de/livres adages».

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Même si parfois la révolte gronde, comme dans «Lettre Ouverte Express»: «…Nous, les soussignés voulons continuer à Rêver/D’un monde meilleur…fleuri jusqu’aux étoiles…» et que de nombreuses anacoluthes accentuent les effets de rupture, la démarche du poète se veut unificatrice comme dans «Porter ses fragments de vie»: «…Tout fragment dément et complète d’autres/fragments/Chaîne infinie aux noces imparfaites…».

Les visionèmes d’Hédi Bouraoui transportent le lecteur bien au-delà des toits, dans une quête de spiritualité universelle: «…Le Tout possible s’illumine d’étoiles/Libéré de quatre murs…portes, impasses, /interdits…/Ainsi l’infini du monde mobilise regards et ouies…».

En refermant le recueil, le lecteur a l’impression d’avoir vu, touché et entendu l’âme du monde. Et aussi je fus très étonnée lorsqu’à la fin de cet article, mon correcteur d’orthographe a offert «visionnâmes» comme premier choix possible pour visionème… que Word ne connait pas encore… Allez savoir!

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