Trois cas pour décortiquer le suicide

suicide, Claude Vaillancourt, La force de ceux qui n’en ont plus
Claude Vaillancourt, La force de ceux qui n’en ont plus, récit, Montréal, Éditions Somme toute, 132 pages, 19,95 $.
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Publié 30/04/2025 par Paul-François Sylvestre

Le Québec compte, en moyenne, trois suicides par jour. Claude Vaillancourt se penche sur cette septième cause de mortalité dans La force de ceux qui n’en ont plus, un récit très intimiste qui se veut un vibrant exercice de partage.

Pour exorciser une obsession variable en intensité, l’auteur se penche sur le parcours très différents de trois personnes identifiées uniquement comme l’ami G., mon frère et l’amie L., tous unis par leur mort volontaire, le suicide.

L’expérience vise à «trouver un quelconque sens, voir aussi un peu à l’intérieur d’eux, mais tout autant à l’intérieur de moi-même».

Mal de vivre

G. est un premier de classe, imbattable dans toutes les matières. Ses liens difficiles avec les femmes le ramènent cependant «à une solitude insupportable» dont il ne parvient pas à sortir. C’est trop lourd pour lui. Le suicide est sa seule porte de sortie. Il l’envisage « de façon quasiment rationnelle ». Il passe à l’acte après avoir consulté en vain un psychiatre.

Le frère de l’auteur est une bombe à retardement, «c’est-à-dire une personne tranquille, mais à qui il peut arriver les choses les plus inattendues à un moment imprévu». Claude Vaillancourt le décrit comme quelqu’un qui était incapable d’accorder son moi profond avec ce qui rend la vie agréable. Cette difficulté est ce qui l’a amené à s’enlever la vie.

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L’amie L. est professeure à l’Université du Québec à Montréal, spécialisée dans le droit du travail. Bipolaire, elle souffre de phases d’excitation maniaques suivies de moments de grande déprime. Puis on lui diagnostique une dégénérescence frontale temporelle, soit un déclin des fonctions cognitives avec une altération du système de la pensée, du jugement et de l’apprentissage. «Je ne peux pas vivre avec ça.»

Démons intérieurs

G. le frère et L. se retrouvent tous dans des situations où ils ne réussissent pas à vaincre des démons intérieurs. Ils se débattent chacun à leur façon avec des douleurs que leurs proches ne soupçonnent guère.

Chaque suicide nécessite sa propre explication. Derrière G. le frère et L. se cache un roman tragique, voire une histoire compliquée dont on ne s’arrête pas de démêler les fils.

Le titre du récit de Vaillancourt s’inspire de la nouvelle L’endormeuse, où Guy de Maupassant affirme que le suicide est «la force de ceux qui n’en ont plus». L’écrivain français ajoute que le suicide, «c’est l’espoir de ceux qui ne croient plus, c’est le sublime courage des vaincus». Cela vaut pour G. le frère et L.

Récit autobiographique

Vaillancourt cite des œuvres de plusieurs écrivains, notamment Le mythe de Sisyphe, d’Albert Camus; Leçons de philosophie, de Simone Weil; Le suicide, d’Émile Durkheim; La difficulté d’être, de Jean Cocteau; Les temps difficiles, de Charles Dickens. Cela donne à son ouvrage une grande subtilité et finesse, symbiosant récit autobiographique et essai.

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Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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