Travailler moins : vive la semaine de quatre jours!

Pour une société plus heureuse

semaine de 4 jours, travailler moins
Des entreprises, des municipalités, des universités lancent des projets pilotes de semaine de quatre jours de travail. Photo: Annie Spratt, Unsplash
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Publié 08/08/2022 par Éricka Muzzo

La semaine de quatre jours de travail se popularise au Canada. De plus en plus d’entreprises, de municipalités et même un établissement postsecondaire lancent des projets pilotes pour permettre à leurs employés d’adopter un horaire de travail réduit, parfois même sans baisse salariale.

Projet pilote

L’Université Saint-Paul d’Ottawa a récemment annoncé un projet pilote de quatre mois qui «pourrait révolutionner son fonctionnement». De juillet à octobre, tout son personnel administratif travaillera 28 heures par semaine au lieu des 35 heures habituelles, sans réduction salariale.

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Jean-Marc Barrette.

«Peut-être que ça va fonctionner à merveille. Peut-être qu’il va falloir adapter certaines choses. Et peut-être aussi que ça va être un échec lamentable… On ne le sait pas tant qu’on ne l’a pas essayé», , lance Jean-Marc Barrette, vice-recteur à l’enseignement et à la recherche à l’Université Saint-Paul.

«Le vrai test, ça va être le mois de septembre avec la rentrée universitaire.»

Mobilité du personnel

Il explique que l’établissement pense depuis plusieurs années à adopter un modèle d’heures de travail réduites et que le contexte de pénurie de main-d’œuvre n’a fait que renforcer cette volonté.

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«En période de plein emploi comme on vit actuellement, il y a beaucoup de magasinage et nos principaux concurrents, ce sont l’Université d’Ottawa, l’Université Carleton, le Collège Algonquin, La Cité…»

«C’est un phénomène qui est nouveau d’il y a un an, un an et demi. On s’échange notre personnel sans arrêt», observe Jean-Marc Barrette.

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Le projet pilote de l’Université Saint-Paul comprend des évaluations mensuelles par les employés.

Moins de stress

L’établissement fait le pari qu’en offrant la semaine de travail réduite — l’Université Saint-Paul est la première université à le faire au Canada d’après le vice-recteur —, ses équipes demeureront plus stables.

«Ce qui va enlever beaucoup de pression sur les collègues et les superviseurs pour former les employés..

Jean-Marc Barrette s’attend à voir moins de stress et moins de détresse psychologique chez les employés, ce qui pourrait se traduire en une baisse des congés d’invalidité.

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Succès à Rivière des Français

Dans le Nord de l’Ontario, la quinzaine d’employés de la petite municipalité de Rivière des Français a l’option, depuis janvier, d’effectuer une semaine de travail comprimée en quatre jours.

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Gisèle Pageau.

Presque tous s’en sont prévalus. «Les employés adorent. Ç’a levé le moral», d’après la mairesse, Gisèle Pageau.

«On est capables de garder le bureau ouvert une demi-heure de plus par jour, donc tout le monde gagne», ajoute-t-elle.

Les employés ont tout de même dû apprendre quelques-unes des tâches de leurs collègues pour compenser.

D’autres municipalités intéressées

Quelques autres municipalités ont téléphoné à Rivière des Français pour s’enquérir des modalités de ce projet pilote qui doit se conclure en septembre avec possibilité de conserver ce nouveau modèle.

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Gisèle Pageau croit que «deux ou trois» ont commencé un projet similaire. Elle s’attend à ce que le sujet fasse l’objet de discussions lors de la conférence 2022 de l’Association des municipalités de l’Ontario (AMO), à la mi-août.

À travers le pays, d’autres municipalités comme Quispamsis et Sackville au Nouveau-Brunswick, et Guysborough en Nouvelle-Écosse, tentent aussi l’expérience… Poussant le Syndicat du Nouveau-Brunswick à réclamer que la Province tente un projet pilote afin d’encadrer la semaine de quatre jours.

Les gouvernements pourraient s’en mêler

Pour Arnaud Scaillerez, professeur à l’École des hautes études publiques de l’Université de Moncton, les gouvernements auront effectivement un rôle à jouer si le modèle continue de se répandre.

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Arnaud Scaillerez.

«Tout dispositif nouveau nécessite d’être encadré pour équilibrer les pouvoirs entre employeurs et employés, afin d’éviter toutes déviances et toutes formes d’abus. Si ce dispositif devait se généraliser, il est certain qu’un encadrement légal à l’échelle fédérale, provinciale et même internationale réduirait les risques d’abus, voire d’esclavagisme moderne», indique-t-il.

D’ailleurs, le professeur a eu écho de réflexions concernant le Code du travail canadien qui viseraient à faciliter la mise en place de la semaine de quatre jours.

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Travailler moins, mais mieux

Arnaud Scaillerez, qui effectue des recherches auprès d’entreprises ayant opté pour la semaine de quatre jours, note qu’il peut s’agir d’une «contrepartie» au télétravail…  «Réservé, en règle générale, à des emplois où les tâches peuvent se faire à la maison, des emplois qualifiés où on travaille devant un ordinateur.»

Si le télétravail est ainsi «réservé à une caste professionnelle et intellectuelle», la semaine de quatre jours peut être mise en place de manière «plus démocratique», souligne l’expert.

D’autres pays en ont d’ailleurs fait l’essai, avec succès, constate-t-il. «Il y a une augmentation du rendement des entreprises ou au moins un maintien du rendement»… Et ce, plus de deux ans après la mise en place du nouveau modèle dans certains cas.

Réduction plutôt que compression des heures

Le professeur observe toutefois qu’il vaut mieux privilégier un modèle de réduction des heures plutôt que de compression, car faire autant d’heures en quatre jours, «ça peut vraiment devenir très fatigant».

C’était une inquiétude à Rivière des Français, mais Gisèle Pageau n’a pas vu de problème à ce niveau. «On ne voit pas de négatif. S’ils préfèrent retourner à la semaine de cinq jours, c’est leur choix», fait-elle remarquer.

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Carole Audet.

À l’Université Saint-Paul, «on a demandé à notre personnel de réfléchir sur la façon dont le travail se fait», indique Carole Audet, vice-rectrice associée, Talent, diversité et culture.

«On regarde aussi à investir dans de nouveaux moyens technologiques, revoir certaines méthodes de travail, regarder le nombre de réunions», ajoute-t-elle.

«L’objectif, c’est de le faire à cout zéro», complète le vice-recteur Jean-Marc Barrette.

L’argent ou le bonheur?

Pour Arnaud Scaillerez, «sur le plan sociologique et philosophique, il faut voir quelle société on veut demain, qu’est-ce qu’on veut créer».

«Est-ce qu’une société moderne, c’est une société qui gagne des milliards, ou est-ce que c’est une société où les employés et les citoyens sont heureux? C’est un vrai choix», souligne-t-il, en ajoutant que cela nécessiterait «une meilleure répartition des richesses».

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En Espagne, 200 entreprises volontaires participeront à un projet pilote de trois ans pour tester la semaine de quatre jours. Le gouvernement espagnol a créé un fonds de 50 millions d’euros afin de compenser les entreprises si elles subissent des pertes.

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