St John’s entre ciel et mer

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Publié 14/10/2014 par Aurélie Resch

«Les baleines sont parties pour cette année. L’été a été exceptionnellement chaud. Elles sont parties. Je suis désolé.»

Venue spécialement à St John’s, Terre-Neuve pour nager avec les baleines, la déception est grande et doit se lire sur mon visage, car mon hôte me demande aussitôt: «Voulez-vous annuler votre séjour à St John’s?». Un «Non!» fuse aussitôt. Pas question d’annuler ma visite à cette partie la plus à l’Est du Canada. «Qu’avez-vous à me proposer pour un petit 48h dans votre ville?»

Excursions en eaux troubles

Anxieux de me mettre à l’eau et d’entretenir l’illusion de possiblement voir des baleines au large, mon hôte m’inscrit sur un tour en bateau avec la compagnie O’Brien, réputée pour ses croisières à la rencontre de baleines et oiseaux marins. Le bateau quitte Bay Bulls sous un ciel d’encre et sur une mer houleuse.

Il a peut-être fait un temps de rêve à St John’s tout l’été, mais depuis mon arrivée, le temps est à l’orage.

On quitte la baie protégée et nous pénétrons dans la grande mer où les vagues soulèvent joyeusement le bateau. Bientôt la démarcation entre le ciel et l’océan s’estompe et le gris nous enveloppe, ainsi que la pluie. Le capitaine du bateau, très jovial, nous demande de bien nous tenir et nous contamine de sa bonne humeur.

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Elle aura raison du brouillard et lorsque nous arrivons à l’ile aux oiseaux, je peux admirer des centaines de macareux pêcher, voler, nidifier aux côtés de toutes sortes de variétés de mouettes et sous la menace de quelques aigles venus chercher pitance dans ce grand vivier à plumes.

Je me laisse attendrir par le spectacle désarmant que m’offrent ces petits oiseaux noir et blanc à bec orange et en oublie presque mes baleines.

Épaves et kayak

Le ciel redevenant opaque, les ballades irlandaises chantées par le capitaine me bercent jusqu’à bon port et permettent à mon imagination de m’évader vers des histoires de bateaux hantés et de cimetière d’épaves.

Tentée par les épaves? Qu’à cela ne tienne. Ma prochaine aventure – toujours en mer- m’amènera en kayak au-dessus d’un cimetière de bateaux engloutis. Le temps toujours peu coopératif ne me permet pas de sonder les eaux alors que nous pagayons tranquillement au-dessus du cimetière. Je n’ai plus qu’à m’en remettre à la parole de mon guide, prolixe en anecdotes.

Lorsque je sonde l’ardoise du ciel et de la mer, je n’ai aucun mal à imaginer les nombreux naufrages et encore une fois mon imagination galope vers des mythes et des histoires que je garderai pour plus tard.

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Deux heures et demie de kayak me permettent d’apprendre beaucoup sur les propriétés des différentes algues, de récolter oursins et étoiles de mer, d’apercevoir deux aigles royaux pêcher et planer au-dessus de la forêt côtière, de pagayer devant des chutes que la pluie est venue grossir, de me fondre dans un décor merveilleux sans horizon et de tester mes résistances physiques de citadines en grande mer. Un grand bol d’air frais. Une aventure que je ne manquerai pas de renouveler.

En route vers St John’s, je m’arrête dans le petit port de pêche Petty Harbour, rendu célèbre pare le film Orca mettant en vedette une orque venue se venger de pêcheurs impitoyables et détruisant la moitié des bateaux et des habitations sur pilotis de ce village.

Heureuse finalement d’avoir été en mer avant de venir ici rafraîchir ma mémoire cinéphile. Le charme pittoresque du port reste intact et je me perds un long moment en contemplation.

À flanc de falaise

«Êtes-vous déjà allée au point le plus à l’Est du pays?». Sûre de sa réponse, ma guide m’entraîne vers Cape Spears pour y voir le phare et les fortifications érigées pendant la Seconde Guerre Mondiale émerger de brouillard.

La visite de ces bunkers révèle la peur d’une attaque du continent par la mer. Rien ne survint pourtant. La promenade dans les environs offre un panorama grandiose sur l’océan et ses falaises découpées.

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La jonction de deux pistes de la célèbre East Coast Trail. Des possibilités de randonnées infinies dans un décor somptueux. Une matinée ne permettant qu’une mise en bouche de la grandeur des sentiers de marche de ce côté-ci de Terre-Neuve.

Les deux phares (l’original datant de 1810, et le récent de 1955) pointent à travers la brume tels des vigiles fantômes de l’activité nautique. Au son de la corne de brume me reviennent des images tirées des descriptions du livre The Fog de Stephen King. Il y a décidément une aura de mystère dans cette partie est de la province.

Autre belle balade en bord de mer, celle qui mène à Signal Hill, juste à côté de St John’s. Moins sauvage, elle n’en reste pas magnifique avec son passage près de maisons de pêcheurs et villas privées colorées, entre les rocs et à flanc de falaise dans le passage exigu «The Narrows», avec toujours une vue surplombante sur la mer et les villages de l’autre côté de l’anse.

Même sous la pluie, la marche reste sympa. Le fort en haut de la colline se distinguant à peine dans le brouillard, et les formes dessinées par le vent et la pluie sur l’océan méritent un temps d’arrêt et promettent des débordements d’imagination fous.

On peut prendre l’une de ces pistes et marcher ainsi la journée. Pour les grands randonneurs, se munir d’une carte à l’office du tourisme, se munir d’eau et de bonnes chaussure est la porte d’entrée à de belles randonnées que des arrêts en Bed and Breakfast rendront encore plus agréables et enrichissantes.

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Baleines ou pas, St John’s reste un coup de cœur et invite à y revenir. Qui sait, l’année prochaine, les baleines m’attendront-elles peut-être?

Renseignements

Y aller: Air Canada offre plusieurs vols par jour de Toronto
Où dormir: Hotel Sheraton St John’s
Kayak de mer: Stan Cook Sea Kayak Adventures
Sortie en mer: O’Brien’s boat tours
Randonnées: The East Coast Trail

Auteur

  • Aurélie Resch

    Chroniqueuse voyages. Écrivaine, journaliste, scénariste. Collabore à diverses revues culturelles. Réalise des documentaires pour des télévisions francophones. Anime des ateliers d’écriture dans les écoles, les salons du livre et les centres culturels.

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