Quand l’art bouscule l’identité de genre

identité de genre, David Beaudoin, La signature rouillée
David Beaudoin, La signature rouillée, roman, Annika Parance Éditeur, collection Coûte que coûte, 2022, 156 pages, 26 $.
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Publié 15/02/2023 par Paul-François Sylvestre

Dans son premier roman intitulé La signature rouillée, David Beaudoin entraîne ses lecteurs dans une spirale d’hallucinations où il mêle polar et fantastique. L’ouvrage est une sorte d’enquête psychologique avec des accents homoérotiques.

Nous suivons ici l’histoire d’un restaurateur d’œuvres d’art, Antoine G., qui vit à Paris, et dont le travail l’amène à s’occuper d’une toile vandalisée par un homme vêtu d’une robe de mariée.

Il se voit comme une sorte de psychologue qui veut avant tout comprendre les motivations de l’artiste, «ce que celui-ci désirait transmettre dans sa création».

Un ou une peintre?

Antoine G. doit restaurer Le sauvetage des malades de l’hôpital de l’Ancienne Charté, œuvre de A. Boulanger abîmée par un vandale. Pour restituer la toile à perfection, il lui faut parvenir à ne faire qu’un avec elle et avec Boulanger.

Le personnage principal dans l’œuvre abîmée est une femme en blanc. Le restaurateur croit qu’elle lève les yeux vers lui. La toile s’anime. Antoine G. devine que cette femme est la muse de l’artiste, voire son amante. Et il est convaincu que Boulanger, artiste inconnu, est une femme.

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Le sauvetage des malades de l’hôpital de l’Ancienne Charté dépeint une scène de 1910, époque où on retrouve plusieurs œuvres provenant d’artistes anonymes. La paternité des toiles est toujours attribuée à des hommes. Antoine G. convainc la directrice du musée d’inscrire désormais Madame devant le nom de Boulanger.

Sexe au sommet de la Tour Eiffel

Dès les premières pages, Antoine G. monte à bord du métro de Paris et, en route, sent le sexe d’un homme cogner sur ses fesses. Il veut se retourner et ordonner à l’homme «de cesser de se frotter contre lui». Il n’en fait rien.

Quelques chapitres plus loin, Antoine G. est «entièrement comblé» lorsqu’il s’éprend d’un homme et se fait pénétrer. Dans une scène onirique, il «se blottit contre le corps de son amoureux» au sommet de la tour Eiffel.

Plus la restauration progresse, plus la femme en blanc passe de simple personnage à proche amie, mieux encore, à véritable complice. Antoine G. croit même qu’elle incarne sa grand-mère, incarcérée dans un institut psychiatrique pour lesbianisme.

Salle d’expérimentation

La restauration de l’œuvre abîmée se fait au Musée Carnavalet. Antoine y entre «comme s’il venait de pénétrer dans une chambre anéchoïque». J’ai dû chercher la définition de cet adjectif… J’ai appris qu’une chambre anéchoïque ou chambre sourde est une salle d’expérimentation dont les parois absorbent les ondes sonores ou électromagnétiques.

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Je signale, en passant, que «carnaval» figure dans le nom du musée Carnavalet. L’auteur aime déguiser ses personnages et les camper dans des marées humaines comme si la montée des eaux de la Seine les transportait dans une sorte de nirvana.

Pour reprendre les mots de l’éditeur, ce roman suscite une réflexion sur la dualité entre folie et normalité, entre féminin et masculin. «Qui décide ce qui est acceptable socialement? Sur quels fondements se bâtit l’identité de genre?»

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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