Peter Doig, peintre d’un réel imaginaire

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Publié 11/03/2014 par Gabriel Racle

«Je pense que dans l’élaboration d´une peinture ce qu’on cherche à représenter, ce n’est pas tant une image du réel qu’une image de quelque chose d’intermédiaire entre l’actualité d’une scène et ce qu’on a dans la tête.» Voilà ce que déclarait Peter Doig en 2003.

Et voilà que s’offre pour la première fois en Amérique du Nord, et ici au Canada, à Montréal précisément, l’occasion de découvrir les œuvres de ce peintre talentueux qui voit dans le réel un monde imaginaire.

Le Musée des beaux-arts de Montréal organise en effet une exposition, Nulle terre étrangère, en cours jusqu’au 4 mai, consacrée à cet artiste qui a des racines montréalaises.

De-ci de-là

Il n’est pas facile de suivre géographiquement l’itinéraire de Peter Doig, car on le retrouve ici et là pendant des périodes variables, ce qui n’est pas sans effets sur son œuvre picturale, notamment des paysages.

Il est né le 12 avril 1959 à Édimbourg, ce qui lui donne bien une origine écossaise. En1962, son père comptable en transport maritime déménage avec sa famille à Trinidad (ou Trinité), où il travaille avec une société de négoce et d’expédition. Cette île des Antilles, colonie britannique, devient indépendante cette année-là. Ce séjour marquera définitivement Peter.

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En 1966, les parents, avec leurs deux filles et deux garçons, se retrouvent au Canada, à Montréal. Peter se rend à Londres en 1979 pour faire des études artistiques au Wimbledon College of Art (1979-1980), à la Saint Martin’s School of Art (1980-1983) d’où il sort avec un baccalauréat ès arts.
Il revient brièvement au Canada et retourne à Londres étudier au Chelsea College of Arts, où il obtient une maîtrise.

Le peintre

Les déplacements de Peter Doig sont loin d’être terminés, mais désormais il met en pratique ce qu’il a pu apprendre de ses études et de son expérience personnelle. Il revient à Montréal en 1986. Sans ressources, il doit travailler pour gagner sa vie. «Je suis devenu, dit-il, un peintre du dimanche qui brassait de la peinture pour un directeur artistique à l’opéra, qui ne me laissait même pas toucher aux toiles.

Puis, j’ai eu un contrat de peintre scénographique pour le film d’horreur The Amytiville Curse. C’est là que j’ai été mis devant un choix: ou bien je continuais ma carrière en scénographie ou bien je lâchais tout pour devenir un peintre à temps plein. J’ai choisi la peinture», rapporte Nathalie Petrowski dans La Presse (13/01/2014).

Peter quitte le Canada en 1989, emportant des souvenirs qui ne le quitteront jamais, une passion pour le hockey et la profondeur de la neige: «Il m’arrive souvent de peindre des scènes enneigées, car d’une certaine manière, la neige a la capacité de nous absorber.»

L’exposition

«Le fait d’exposer à Montréal, une ville où j’ai vécu et travaillé et que j’aime profondément, compte beaucoup pour moi. Mes années au Québec durant mon enfance, à l’époque de l’Expo, au début de mon adolescence et, plus tard, ma vingtaine passée à Montréal, ont été déterminantes pour l’évolution de ma peinture», déclare Peter Doig.

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Et c’est cette évolution que l’exposition permet de découvrir lors d’un somptueux parcours. Celui-ci «se déroule comme un voyage, comme une plongée à la fois dans les secrets du travail créatif de ce grand peintre et dans l’imaginaire qui peuple ses toiles et les rend si évocatrices.

D’une galerie à l’autre, les visiteurs découvriront les grands thèmes qui structurent l’œuvre de Peter Doig, à commencer par la peinture elle-même, dont il explore les moyens expressifs, le pouvoir narratif, et l’histoire, avec une virtuosité sans pareille.

«Scènes arrachées au quotidien, paysages tropicaux, visions d’êtres fantomatiques, figures solitaires, vaisseaux, forêts, murs, il n’est pas de sujet qui ne soit pour Doig l’occasion d’un investissement absolu dans l’acte de peindre.» (Musée)

Livre d’art

Le catalogue de cette exposition est un superbe ouvrage que les amateurs d’art, visiteurs ou non de l’exposition, auront grand plaisir à parcourir. De grand format, 31×25,5 cm, relié, il compte 224 pages et, à part les 17 dernières qui comportent la liste des œuvres, une chronologie et une bibliographie, chaque page est illustrée par une ou plusieurs représentations picturales.

Le lecteur a donc la possibilité d’étudier de près les œuvres de l’artiste qu’il a vues sur place ou qu’il découvre dans ce livre d’art, dont les textes d’accompagnement facilitent la lecture des reproductions aux couleurs vives, contrastées, exotiques, selon les sujets abordés, comme l’huile sur toile de l’illustration.

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Le caractère étrange de certaines œuvres surprendra, la bizarrerie d’autres étonnera, la composition de quelques-unes étonnera ou amusera. Mais il suffit de se laisser imprégner par l’atmosphère ainsi créé pour être fasciné par ce qui apparaît sous le regard. La monotonie n’a pas de place ici, bien au contraire.

«Les toiles de monsieur Doig sont si belles qu’elles exercent un attrait irrésistible…» (Julie Belcove, The New York Times, 25/07/2013)

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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