Penser la canopée urbaine pour réduire les allergies

Les bienfaits du verdissement des villes ne sont plus à démontrer. Mais la multiplication des arbres risque-t-elle d’être nuisible aux gens qui souffrent d’allergies saisonnières?
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Publié 29/05/2020 par Isabelle Burgun

Les bienfaits du verdissement des villes ne sont plus à démontrer: réduction de la température de l’air et du bruit, embellissement de l’environnement, promotion de l’activité physique. Mais la multiplication des arbres risque-t-elle d’être nuisible à certains de ceux qui souffrent d’allergies saisonnières?

Le potentiel allergène des arbres urbains s’avère très mal connu, révèle une récente étude québécoise.

Alors que plusieurs villes cherchent à augmenter leurs canopées, il importe de mieux comprendre leur contribution aux allergies saisonnière et de diversifier les espèces en conséquence.

La canopée urbaine est belle et utile. Photo: Natalia Bachkova, Dreamstime.com

Pollen

«Nous manquons d’informations valables sur l’allergénicité du pollen des arbres urbains. Nous plantons encore trop souvent dans l’ignorance des risques», explique la postdoctorante au département de sciences biologiques de l’UQAM et au Centre de recherche pour la forêt, Rita Sousa-Silva.

Certaines espèces d’arbres libèrent des grains de pollen au printemps: ainsi, les bouleaux et les aulnes sont déjà connus comme des sources d’allergies. Pourtant, des données manquent sur la concentration de pollen dans l’air et la variabilité entre les espèces voisines.

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À Montréal, par exemple, l’érable de Norvège, l’érable argenté et le frêne de Pennsylvanie, forment le trio d’arbres urbains le plus commun: près de 50% des espèces les plus plantées. Il est également courant de planter plus souvent des mâles en ville pour limiter les fruits, alors qu’ils sont les principales sources des allergies saisonnières.

Diversité

Pour contrer cela, il faudrait donc faire place à plus de diversité dans notre canopée urbaine. «Il importe de planter différentes espèces et de varier les sexes, mais surtout d’avoir une image claire sur les sources d’allergie», insiste la chercheuse.

Il est nécessaire également de multiplier les stations d’échantillonnage du pollen.

Une étude nord-américaine utilise le site Pollen.com comme source d’information pour le caractère allergène du pollen. C’est aussi ce que l’équipe québécoise veut faire pour Montréal, en multipliant les sources d’informations disponibles.

Qui plus est, lorsque certaines espèces sont victimes de maladies, comme l’agrile du frêne, diversifier les plantations peut aider à limiter la propagation.

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L’herbe à poux

«Le pollen des arbres peut effectivement provoquer des allergies printanières», confirme le professeur titulaire de l’École supérieure d’aménagement du territoire et de développement régional de l’Université Laval, Claude Lavoie.

«Elles restent toutefois marginales à côté des allergies causées par le pollen de l’herbe à poux en août et en septembre, et contrairement à l’herbe à poux, les arbres procurent d’autres bénéfices en milieu urbain, qui dépassent largement les inconvénients. »

Le biologiste spécialiste de la lutte à la petite herbe à poux confirme que l’on «manque de données pour évaluer correctement le caractère allergène des arbres». Ça nous aiderait «à faire de meilleurs choix dans les plantations».

Herbe à poux
À gauche, l’herbe à poux. À droite, l’herbe à puce. Photo: Wikipedia Commons

Trop d’érables?

Pour lui, le problème est que les arbres candidats en ville ne sont pas si nombreux, avec les maladies et les insectes envahissants qui se propagent aux frênes ou aux ormes, entre autres.

«Je suis aussi un peu surpris de cette insistance sur l’érable. Les érables sont très nombreux en ville dans le nord-est de l’Amérique, mais c’est bien davantage le fait des plantations d’érables de Norvège — une espèce exotique envahissante qui fleurit tôt au printemps — que d’érables argentés ou de toute autre espèce d’érable.»

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Dans certains quartiers de Montréal, l’érable de Norvège peut représenter de 20 à 70% des arbres urbains. «De nos jours, on en plante moins pour éviter de se retrouver dans des situations monospécifiques désastreuses en cas de nouveau champignon ou de ravageur», note le chercheur.

Auteur

  • Isabelle Burgun

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada et la seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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