Hédi Bouraoui a récemment publié son douzième roman intitulé Paris berbère. À eux seuls, ces deux mots laissent déjà deviner qu’il est question de pluralisme culturel, un thème cher à ce professeur émérite de l’Université York.
Paris berbère nous introduit dans la vie d’un couple franco-algérien, Théophile Deviau et Tassadit Aït Mohand. Leurs relations constituent un chassé-croisé qui nous fait traverser aussi bien les frontières historiques que les frontières culturelles. L’aïeul de Théophile et celui de Tassadit partagent d’ailleurs l’amour de la poésie, ce «don du verbe qui enflamme».
Auteur de 21 recueils de poésie, Hédi Bouraoui est prisonnier des mots, ce qui ne l’empêche pas d’en inventer au besoin. Son personnage, écrit-il, est heureux quand il donne libre cours à ses rêveries qui aboutissent à ce qu’il appelle sa faisance ou ce plaisir de faire quelque chose de gratuit, «ce coup qui comble de bonheur».
Théophile cherche à «délier quelques nœuds gordiens de sa vie», à résoudre un algorithme «qui apporterait le point d’orgue à la faisance ultime et en même temps le repos à sa conscience torturée». La vie de Théo se module au gré d’absences et de présences, tantôt de sa mère, tantôt de sa femme.
La partie la plus intéressante du roman, à mon avis, porte sur Mai 68. J’ai eu l’impression qu’Hédi Bouraoui était presque aux côtés de Daniel Cohn-Bendit, qu’il faisait la guerre des barricades dans le Quartier latin, qu’il entendait Sartre se faire huer à la Sorbonne et qu’il prêtait une oreille critique à Charles de Gaulle discourant sur une réforme en profondeur.