Nouvelles de Geneviève Boudreau: le pouvoir des mots décrivant des lieux

nouvelles, Geneviève Boudreau, Votre arrêt n’est pas desservi
Geneviève Boudreau, Votre arrêt n’est pas desservi, nouvelles, Montréal, Éditions du Boréal, 2023, 130 pages, 22,95 $. Photo: Atwood photographie
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Publié 26/07/2023 par Paul-François Sylvestre

Lorsque je lis un recueil de nouvelles, j’aime un texte qui a un début, un milieu et une fin, préférablement inattendue. Ce n’est point le cas dans Votre arrêt n’est pas desservi, de Geneviève Boudreau. Être décontenancé s’avère parfois agréable.

Le titre du recueil a son écho dans la troisième nouvelle qui fait à peine une page et demie. On y lit: «Le Métrobus n’arrive toujours pas. Un peu plus et tu pourrais croire que ton arrêt n’est pas desservi. L’univers entier semble en suspens.»

L’autobus revient

L’autobus roule dans plus d’une nouvelle. Le nom de rues sert de titre à au moins quatre d’entre elles: Rue Rochambeau, Rue Laberge, Rue de Beaurepaire, Rue Bellefeuille. Les adresses des maisons peuvent être exactes, mais aucune n’était habitée au moment de l’écriture du recueil.

Selon la nouvelliste, chacun croit occuper un lieu, «mais c’est en fait ce lieu qui l’habite, dresse ses murs intérieurs à mesure que la mémoire érige ses souvenirs».

Les personnages ne sont pas les seuls à capter notre attention. Il y a un rat qui grignote un restant de hamburger dans les bras d’une passagère d’autobus. Et une famille est décrite en parlant des cloportes autour d’un gigantesque cactus candélabre dans une cuisine.

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Nouvelles à touches florales

Parfois, l’éclat d’une histoire est celui des grands érables bordant les pelouses. Une attention est portée aux touches florales qui bordent les portes, aux balcons de bois ou à la table d’un bistro.

Du quotidien des gens, il ne reste que «ces ombres à peine esquissées, aigrettes de pissenlits dont les graines germent sans prévenir».

Dans une nouvelle, une femme arrête de peindre parce qu’elle n’est qu’une bonne copiste. À force d’imiter les autres, elle a peur de ne plus jamais pouvoir être elle-même. «Comme un caméléon qui oublierait sa couleur propre.»

La lune fait pousser les cheveux

Geneviève Boudreau ne manque pas d’originalité. Elle imagine une grand-mère qui suit le mouvement de la lune pour se couper les cheveux. Cela aurait à voir «avec la vitesse de la repousse, sa force ou sa brillance».

Il arrive qu’une nouvelle soit entièrement consacrée à la description d’un environnement, naturel ou immobilier. En parlant d’une maison abandonnée, l’autrice note qu’il en existait à Détroit après la crise économique.

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Une question demeure au cœur de la nouvelle La crotte sur la pelouse; Gabrielle demande à Alexandre pourquoi il a fait ça? C’est peut-être plus une affirmation: tu as fait ça, Or, elle n’a pas plus envie que lui de nommer le ça, «de le faire advenir ici, dans leur cuisine».

Souvenirs de rencontres

À la fin du recueil, on peut être tenter de se demander si la nouvelliste conserve, de toutes les interactions entre personnages, objets et lieux, de vaines préoccupations.

Les souvenirs semblent se désagréger lorsqu’elle ferme les yeux pour tomber dans les bras de Morphée.

Née aux Îles de la Madeleine, Geneviève Boudreau vit à Québec. Elle détient une maîtrise en études littéraires sur la poésie de Saint-Denys Garneau. Ses textes ont été finalistes aux prix littéraires Radio-Canada. Elle enseigne la littérature au cégep de Sainte-Foy.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

  • l-express.ca

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