Neutre face à l’injustice: du poème au conte universel

Andrée Poulin, Quand ils sont venus
Andrée Poulin, Quand ils sont venus, album illustré par Sophie Casson. Montréal, Éditions de l’Isatis, collection Griff, no 20, 2024, 48 pages, 26,95 $.
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Publié 16/10/2024 par Paul-François Sylvestre

«L’histoire que je vais te raconter pourrait te faire l’effet d’une claque. Ou d’un coup de poing.» Tels sont les premiers mots de l’album Quand ils sont venus, d’Andrée Poulin. Il est question de ne pas rester neutre face à l’injustice.

En quarante ans, cette écrivaine franco-ontarienne a publié une soixantaine de livres pour sensibiliser les enfants à des réalités socio-politico-communautaires. Sa plume alerte et colorée captive l’attention et glisse des messages d’ouverture.

Vie paisible

Quand ils sont venus raconte l’histoire d’un village paisible où chacun vit sa vie, heureux et tranquille au bord du lac Paisible. Les personnages sont des chiens, des renards, des coyotes, des loups et des fennecs, tous observés par un grand-père chien.

Dans les parages rôdent les Sans Entrailles qui veulent «que tous les habitants soient à leur image. Lisses et sombres. Menaçants et méchants.» Ils décident de faire la loi dans ce village où tous s’entendent bien… malgré leurs différences.

Les Sans Entrailles s’en prennent aux renards parce qu’ils sont roux, aux loups parce qu’ils ont de belles terres fertiles, aux coyotes qui vénèrent leur dieu et aux fennecs qui s’aiment différemment. Chaque fois, grand-père dit: «Ce ne sont pas mes affaires», et il ferme les yeux.

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Le célèbre poème de Martin Niemöller

Vous reconnaissez sans doute ce scénario basé sur le célèbre poème Quand ils sont venus, du pasteur allemand Martin Niemöller. «Quand ils sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit. / Je n’étais pas communiste.» Et ainsi de suite pour les syndicalistes, les Juifs et les catholiques. «Quand ils sont venus me chercher, / il ne restait personne pour me défendre.»

Traduit dans de nombreuses langues, ce poème universel et intemporel illustre le danger de l’indifférence et dénonce l’inaction.

Très riche, grand-père vit dans une immense maison et dirige une imposante usine de croquettes. Sa fortune rend jaloux les Sans Entrailles rapaces. Quand ces derniers viennent le chercher, il re reste personne pour le défendre, bien entendu.

Neutralité illusoire

L’autrice entend des enfants dire qu’il n’y a pas d’espoir dans cette histoire. Ce n’est pas le cas. «L’espoir est dans ce que toi, tu diras… / Dans ce que toi, tu feras… / pour dénoncer l’injustice.»

Deux citations sont placées en exergue au début de l’album. Desmond Tutu: «Rester neutre face à l’injustice, c’est choisir le camp de l’oppresseur.» Jean-Paul Sartre: «Ne pas choisir, c’est encore choisir.»

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À la fin de l’album, on trouve la définition et le contexte du racisme, du colonialisme, de la persécution religieuse, de l’homophobie et de l’appropriation des richesses d’autrui.

Andrée Poulin réussit encore une fois à mettre son imagination fertile au service des laissés-pour-compte.

Auteurs

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

  • l-express.ca

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