Face à la vie qui demeure si précaire, Pierre Léon semble se dire que, heureusement, il y a l’écriture qui demeure. Je lui donne raison. Depuis 1960, soit au cours des cinquante dernières années, Pierre Léon a publié 48 ouvrages, dont 26 en solo et 22 en tant que co-auteur. Ces deux dernières créations ont paru à la fin de 2009: La Nuit du subjonctif, un recueil de nouvelles, et Séduction des hommes et vertu des dieux, des chroniques irrespectueuses.
Dans La Nuit du subjonctif, Pierre Léon a fait du patchwork ou un piqué comme on dit en canayen. Il a rassemblé une variété de pièces, les a cousues avec finesse et cela a donné un édredon littéraire qui nous réchauffe le cœur.
La première nouvelle donne au recueil son titre. Le subjonctif y trône: «Il eut fallu que nous le sussions», n’est-ce pas. Il nous fait parfois hésiter: «Je voudrais pas que vous mourassiez… ou mourussiez.» Le correcteur de mon programme Word m’indique que «mourussiez» est le bon mot.
Grand jongleur des mots, Pierre Léon aime parfois que le qualificatif rime avec le nominatif – «donzelles à dentelles» – ou que les deux adjectifs riment aisément: «tous ces corps graciles et dociles».
Il a même l’art de bien agencer les plats et les vins. Ainsi, dans la dernière nouvelle intitulée La méprise de Jésus, on voit Dieu le Père somnoler le plus souvent dans son fauteuil capitonné de velours rouge, quand il ne se régale pas «de pets de nonnes arrosés d’un petit vin de messe».