Le spectateur passif, à l’Alliance française de Toronto

Des photos à emporter

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Publié 14/05/2013 par Guillaume Garcia

Deux étudiants de Ryerson ont investi la galerie Pierre-Léon de l’Alliance française avec l’idée de briser les tabous liés aux galeries d’art. Plusieurs centaines de photos sont accrochées au mur par de petites pointes et le spectateur est invité à choisir celle qu’il préfère afin de la remporter chez lui. Les clichés en noir et blanc de Benjamin Freedman et Aaron Friend Lettner ont été pris à Toronto et Édimbourg avant d’être rassemblés tant les parallèles entre les deux collections étaient surprenants.

Les deux camarades de classe à Ryerson ont participé au concours organisé par leur université et l’Alliance française de Toronto sans vraiment savoir comment allait s’organiser leur travail. Alors que Benjamin Freedman est à Toronto, Aaron Friend Letter passe un an à Édimbourg, en Écosse.

«Quand on a regardé nos photos, on a vu beaucoup de parallèles, alors que l’on n’avait pas de thèmes ni rien. Il y a des photos qui se ressemblent énormément », dit Benjamin, rencontré quelques minutes avant le vernissage de l’exposition Le spectateur pensif, qui fait partie du Festival Contact. Pour l’occasion, la galerie Pierre-Léon a été repeinte en gris foncé, pour mieux mettre en valeur le mur de photos des deux étudiants.

Des photos physiques

Sur une surface de liège, des centaines et des centaines de photos sont accrochées, toutes en noir et blanc, pour un rendu très sombre et très mélancolique. Pourtant les photos en elles-mêmes ne sont pas si ternes.

Les clichés ont tous été pris en 35 mm, un format qui attire les deux jeunes photographes, qui savent bien évidemment travailler en numérique quand il le faut.

«Moi j’aime les choses physiques, qu’on peut toucher, comme le film photo. J’aime l’esthétique des films et je préfère avoir mes photos dans des enveloppes chez moi, plutôt que dans un ordinateur. Et c’est une offre pour le public, touchez les photos, emportez-en une», explique Benjamin, qui a d’ailleurs une anecdote amusante à propos de l’exposition. «La première fois qu’on a installé les photos, un enfant est venu avec son père. Il allait toucher une photo et le père lui a dit ‘Non tu ne peux pas toucher, ici c’est une galerie d’art. Je lui ai dit que justement tout le but de l’exposition était qu’on puisse toucher les photos. On veut casser ce tabou des galeries où on ne peut rien toucher.»

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Des vidéos intouchables

Grand amoureux du film photo, qu’il peut toucher à sa guise, Benjamin s’en sert aujourd’hui pour faire de la sculpture. Il fait aussi de la vidéo, dont on peut voir un exemple dans la galerie Pierre-Léon où lui et son collègue ont installé deux projecteurs vintages qui dévoilent deux films très statiques tournés à la Bolex 16mm, mais qui contrastent avec les photos dans le sens où ne peut capturer le film et l’emmener chez soi.

«C’était aussi une manière d’engager le spectateur dans l’exposition. Il doit interagir avec les photos, pour choisir celle qu’il veut prendre, et regarder les films, même s’il ne peut pas les emporter. Et puis les films ne sont pas de la même durée. Parfois les images vont parfaitement les unes avec les autres. On ne verra jamais deux fois les mêmes images l’une à côté de l’autre. À chaque fois que je regarde les films je me dis ’Whaou’ ça donne ça sans faire exprès!», indique Benjamin.

Les films vieillissants aussi rapidement, les spectateurs qui viendront à la fin du mois ne verront pas la même qualité d’image que ceux du début, mais auront un cachet plus important.

Le spectateur passif se transformera donc en spectateur engagé par la force des choses. S’il veut choisir une photo, il lui faudra toutes les regarder. Peut-être la recette du succès!

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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