«Si CBC/Radio-Canada n’existait pas aujourd’hui, faudrait-il l’inventer?» On se demandait ça parfois dans le temps de Stephen Harper, comme on suggère périodiquement de privatiser la LCBO ou de fusionner les conseils scolaires laïcs et catholiques.
J’avais écrit en 2005 (année marquée par un conflit de travail qui avait perturbé la programmation de CBC/Radio-Canada) que ces débats étaient parfaitement justifiés et légitimes en démocratie: «Pourquoi l’État provincial s’occupe-t-il directement de la vente de l’alcool et non de celle des livres ou des vêtements?» Juste parce «c’est comme ça»? Ou, pour paraphraser Rona, parce qu’«on l’a»? Ou parce que «si ce n’est pas brisé, n’y touchez pas»?
Et d’ajouter: «Personne ne songe à créer un journal étatique bilingue pour complémenter les grands quotidiens, les magazines et la presse locale. Si la radio et la télévision canadiennes s’étaient développées autour de CTV et TVA, et un peu plus tard autour de plusieurs autres entreprises privées, comme aux États-Unis, souhaiterait-on aujourd’hui créer un radio-télédiffuseur étatique? Réponse: non.»
De la fiction à la réalité
J’étais loin d’imaginer qu’en 2018, une grande rédaction privée comme celle de La Presse, à Montréal, allait passer au secteur public en devenant une «fiducie d’utilité sociale» à but non lucratif, dans le but de bénéficier de subventions gouvernementales et de dons institutionnels et privés.
Pas un «journal étatique», mais plus vraiment un média indépendant privé au sens classique de la liberté de presse.