Le français face aux algorithmes: une résistance numérique s’organise

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Discussion sur le thème de la résistance numérique à l'UOF. Photos: Patrick Bizindavyi, l-express.ca
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Publié 20/02/2025 par Patrick Bizindavyi

La question de la visibilité du français sur le web était au cœur des discussions d’une table de concertation sur La langue française comme résistance numérique: enjeux de découvrabilité de contenus francophones en milieu français minoritaire, tenue à l’Université de l’Ontario français (UOF) ce mercredi 19 février.

Organisée par Sarah Choukah (UOF) et Chanel Robin (Université de Montréal), cette rencontre qui a réuni une vingtaine de participants en ligne et en présentiel, visait à identifier les obstacles à la diffusion du français en ligne et à proposer des pistes d’action pour les organismes franco-ontariens.

Un projet de recherche au service de la francophonie

«Nous voulons poser la langue française comme forme de résistance numérique par rapport à l’anglais dans le milieu franco-ontarien», explique Chanel Robin.

Elle souligne l’importance d’une recherche-intervention pour mieux comprendre les réalités des organismes communautaires et encourager la publication de contenu en français, malgré une présence dominante de l’anglais sur les plateformes numériques.

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Fatima-Zahra Khoukh (consultante en solutions et applications GEN AI), Christian Martel (ancien fonctionnaire du gouvernement de l’Ontario), Sarah Choukah (professeure adjointe à l’UOF), Chanel Robin (étudiante à la maîtrise, auxiliaire de recherche et d’enseignement à l’Université de Montréal), Hela Zahar (professeure responsable du Pôle d’études et de recherche en cultures numériques à l’UOF).

Découvrabilité: un enjeu central

Les discussions ont mis en évidence la difficulté pour les contenus francophones d’être bien référencés en ligne. «Le français est une langue minoritaire sur Internet, souvent non favorisée par les algorithmes», déclare Sarah Choukah.

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Les plateformes privées, régies par des critères commerciaux, donnent une visibilité préférentielle aux contenus anglophones. Une des questions soulevées était donc de savoir comment contourner ces biais algorithmiques pour renforcer la présence du français en ligne.

Un paradoxe à dépasser

Les débats ont également mis en lumière une tension intéressante. «Nous voulons que la langue française soit davantage répandue sur le web. Mais en même temps, si elle était aussi dominante que l’anglais, elle ne serait plus une langue de résistance», relève Chanel Robin.

Cette réflexion souligne la nécessité d’un équilibre entre visibilité et autonomie culturelle.

Des solutions à explorer

Parmi les solutions envisagées, plusieurs pistes ont été évoquées.

Il s’agit notamment de promouvoir l’utilisation de plateformes alternatives qui ne favorisent pas uniquement l’anglais, afin d’offrir aux créateurs de contenu francophone un espace où leur visibilité n’est pas compromise par des algorithmes anglophones.

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L’encouragement de la traduction humaine – assistée par intelligence artificielle – est également une piste importante, à condition de veiller à la qualité linguistique des contenus.

Par ailleurs, l’optimisation des stratégies de référencement en français sur Google est essentielle pour améliorer le référencement des contenus francophones et assurer leur accessibilité en ligne.

Enfin, le développement de collaborations avec d’autres communautés linguistiques minoritaires pourrait permettre de renforcer une présence collective sur le web et d’accroître la découvrabilité du français dans un environnement numérique majoritairement anglophone.

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La professeure Hela Zahar.

Témoignages et expériences pratiques

Christian Martel, ancien traducteur pour le gouvernement de l’Ontario, a partagé une anecdote marquante sur les difficultés techniques liées à l’usage du français dans l’administration publique.

«Pendant longtemps, certains systèmes informatiques ne permettaient même pas d’afficher les accents français, ce qui posait des problèmes de compréhension et d’authenticité des documents officiels.»

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Une participante a également partagé son expérience sur Instagram, expliquant pourquoi elle préfère traduire elle-même ses publications plutôt que de se fier aux outils de traduction automatique. «Je veux être certaine que les mots utilisés reflètent exactement mon intention.»

Prochaines étapes

Cette table de concertation marque une étape clé dans un projet de recherche qui se poursuivra tout au long de l’année.

Les organisateurs comptent publier un article à l’automne dans le Canadian Journal of Communication et prévoient des entretiens approfondis avec des organismes franco-ontariens pour affiner leurs recommandations.

«Nous allons continuer d’explorer comment les francophones en milieu minoritaire peuvent tirer parti des outils numériques tout en affirmant leur identité linguistique et culturelle», conclut Sarah Choukah.

Un appel est lancé à toutes les organisations souhaitant s’impliquer dans cette démarche pour renforcer la présence du français sur le web et garantir sa découvrabilité à long terme.

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