Le droit de lire: nouveau curriculum ontarien

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Publié 21/01/2024 par Annique Maheu

En avril 2023, le gouvernement ontarien annonçait un nouveau curriculum visant à renforcer les compétences en écriture, en lecture et en mathématiques pour les élèves de la maternelle à la 8e année. La plupart des Ontariens ignorent que ce nouveau curriculum a été élaboré en réaction au rapport de la Commission ontarienne des droits de la personne (CODP) qui déclarait que la province manquait à ses obligations du «droit de lire» auprès des enfants.

En 2012, suite au procès juridique Moore c. Colombie-Britannique (Éducation), la Cour suprême du Canada a rendu une décision unanime reconnaissant que l’apprentissage de la lecture n’était pas un privilège, mais un droit de la personne fondamental et essentiel.

Le plus haut tribunal du pays mettait en évidence le manque de programmes et de services offerts pour l’apprentissage de la lecture auprès des élèves ayant des troubles d’apprentissage.

Une enquête menée en Ontario

En 2019, la CODP a mené une enquête publique faisant suite à la décision de la Cour suprême sur le droit de lire.

Elle voulait évaluer l’impact de cette décision auprès des élèves ayant des problèmes en lecture en Ontario. Le rapport de l’enquête, Le droit de lire, publié en janvier 2022, a confirmé que la province de l’Ontario manquait systématiquement à ses obligations envers les élèves ayant des problèmes en lecture.

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Selon les conclusions principales de l’enquête, il y avait un besoin urgent d’améliorer les résultats en lecture.

La clé du succès comprenait:

  • l’adoption d’une approche d’enseignement fondée sur la science de la lecture;
  • la formation et l’évaluation du personnel enseignant;
  • le dépistage précoce d’élèves à risque de difficulté en lecture et l’adoption de mesures d’appui pour les élèves ayant des besoins.

Dans son rapport, la CODP mettait en évidence le lien étroit entre l’égalité en matière d’apprentissage de la lecture et l’égalité en matière de perspectives d’avenir chez les élèves ontariens.

Le rapport ne fait aucune mention des impacts de la pandémie de la COVID-19 et des séquelles qu’ont pu causer les modes d’enseignements modifiés durant cette période.

Nouveau curriculum

Le 16 avril 2023, le ministre de l’Éducation de l’Ontario, Stephen Lecce, déclarait «nous retournons aux éléments fondamentaux, car c’est ce qui compte le plus lorsqu’il s’agit des compétences des élèves en lecture, en écriture et en mathématiques».

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À la rentrée 2023, le système d’éducation publique de l’Ontario adoptait le nouveau curriculum ou programme-cadre de français. Selon la mise en contexte, le programme-cadre a été «conçu pour doter tous les élèves de connaissances et habiletés fondamentales nécessaires pour réaliser leur plein potentiel».

Le nouveau curriculum devait délaisser son approche de littératie globale équilibrée, qui encourageait les élèves à deviner ou prédire les mots à partir d’indices tirés du contexte et de leurs connaissances antérieures. Selon la CODP, cette approche ne privilégiait pas les méthodes efficaces pour l’enseignement de la lecture des mots au primaire, et dégageait les enseignants de leur responsabilité en matière d’enseignement.

Des stratégies qui ont fait leurs preuves

Selon la directrice des communications du ministère de l’Éducation, Ingrid Anderson, le nouveau programme-cadre du français adopte des stratégies qui ont fait leurs preuves depuis des générations.

«Ceci comprend l’introduction de la phonétique pour favoriser le développement de compétences en lecture, en écriture cursive, en pensée critique et en littératie numérique, conformément aux recommandations faites par la Commission ontarienne des droits de la personne dans son rapport Le droit de lire», affirme Mme Anderson.

Le ministère souligne que le nouveau curriculum a été guidé par la recherche d’experts de l’Université de Toronto, l’Université York et l’Université d’Ottawa, ainsi que plus de 60 enseignants francophones et anglophones. De plus, le ministère souligne la collaboration avec Dyslexie Canada, les conseils scolaires et les partenaires autochtones.

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Mme Anderson précise que la province a investi de larges sommes afin d’appuyer ce nouveau curriculum.

«Pour aider davantage de jeunes élèves à acquérir de solides compétences en lecture, la province a investi 109 millions $ en 2023-2024. Cet investissement appuie la mise en œuvre pour l’année scolaire 2024-2025 des nouvelles exigences en matière d’évaluation de la lecture à un plus jeune âge pour tous les élèves du jardin d’enfants à la 2e année.»

Mise en oeuvre du curriculum

Au Conseil scolaire catholique Mon Avenir, la venue du nouveau curriculum représente l’adoption d’une nouvelle approche à l’enseignement de la lecture et un déploiement de ressources importantes pour appuyer les élèves qui fréquentent ses écoles élémentaires.

Frédéric Bergeron, surintendant responsable du Service de la pédagogie, souligne que parmi les nouvelles ressources déployées, le Conseil compte l’embauche de quatre nouveaux enseignants accompagnateurs en littératie qui appuient les enseignants de la maternelle à la 3e année.

La formation Science de la lecture est offerte auprès de son personnel au cycle primaire et des classes d’apprentissage alternatif.

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Il y a également la formation sur la lecture interactive enrichie auprès de tout son personnel enseignant de la maternelle à la 3e année ainsi que pour les éducateurs de la petite enfance, les conseillers pédagogiques et le personnel d’orthophonie.

De plus, le Conseil a procédé à l’achat de ressources systématiques en lecture qui sont en lien avec la science de la lecture (Décode, Escalire, etc.). Pour consolider le tout, la création de nouveaux outils d’évaluation était de mise.

Le programme est bien reçu

«Le nouveau programme-cadre est bien reçu, conjointement avec la formation sur la science de la lecture», déclare M. Bergeron. «Ce que nous entendons des directions et des enseignants qui reçoivent la formation, c’est qu’ils en sont enchantés.»

«Dans le cadre de la formation, le personnel reçoit des outils qui vont amener les élèves à développer davantage les compétences en lecture et en écriture. Nous sommes convaincus que nous aurons un impact sur l’apprentissage des élèves, leurs compétences et leur goût à la lecture.»

En 2020, Denise Petitpas, enseignante agréée en Ontario, a fondé l’entreprise Le Coin des Louveteaux à Lafontaine, dans la région de la Baie Géorgienne, afin de répondre à un besoin criant de mise à niveau en lecture pour les élèves du palier élémentaire.

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Sachant qu’il existait du côté anglophone une méthode d’enseignement de la lecture très structurée et basée sur la science de la lecture, elle s’est lancée dans la poursuite de formation et d’achat de ressources équivalentes pour la langue française. Elle a constaté qu’en français, il y avait du chemin à faire.

Formation des enseignants

Mme Petitpas, qui enseigne en actualisation de la langue française à l’école élémentaire catholique Sainte-Croix depuis septembre 2023, partage maintenant un sentiment d’enchantement face au nouveau programme-cadre de français, maintenant fondé sur la science de la lecture.

Elle souligne toutefois l’importance de la formation des enseignants en science de la lecture.

«Un curriculum est un document. Mais ce qui compte c’est la formation du personnel pour ce curriculum afin de savoir comment enseigner l’apprentissage de la lecture. Les enseignants doivent être formés pour livrer ce curriculum», affirme Mme Petitpas.

«Au Conseil scolaire catholique Mon Avenir, c’est déjà en oeuvre et c’est génial. En plus de la formation systématique, le conseil a fait des achats de ressources et de livres décodables par syllabes en ordre de complexité qui ne sont pas traduits de l’anglais et qui reflètent mieux les balises de la science de la lecture en français.».

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Mme Petitpas souligne le fait que certaines bibliothèques de la région, dont la Bibliothèque de Penetanguishene, ont acquis de telles ressources en français pour appuyer les élèves et les familles francophones de la région.

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