L’art et le voyage à la découverte du Japon

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Publié 08/01/2013 par Gabriel Racle

Titre évocateur, qui peut faire rêver, surtout si l’on songe à ce qu’écrivait le poète romantique français Alphonse de Lamartine, dans son Voyage en Orient, publié en 1835: «Le monde est un livre dont chaque pas nous ouvre une page.» Comment ne pas avoir en vie de découvrir encore d’autres pages?

Voyager est un art, certes, si l’on voyage pour son plaisir et pas seulement pour affaires. «L’art de voyager est un art de vivre que nous gagnerons tous à découvrir», écrit l’auteur anonyme de L’art du long voyage (Internet). Si l’on ne se contente pas de voir, mais de découvrir et de comprendre ce que l’on voit, il en va bien ainsi.

Mais l’art du voyage a aussi une autre signification, c’est l’art qui découle du voyage, ce que l’on en retient, que l’on en rapporte. Pendant longtemps, ce sont les récits des écrivains qui ont tenu la vedette, comme les récits de voyage de Samuel de Champlain en Nouvelle-France (1620-1632) ou les romans de Pierre Loti qui conte ainsi son voyage au Japon dans Madame Chrysanthème (1887).

La plume de l’auteur s’accompagne parfois du crayon du dessinateur, dans des carnets de voyage illustrés (L’Express, 1er mai 2012). Mais de nos jours, l’art du voyage s’exprime surtout par la photographie, si commune avec le numérique, et que des passionnés transforment en «œuvres d’art», avec des logiciels perfectionnés.

L’art du voyage

Ne serait-il pas aussi – ou plutôt, selon les opinions – celui que dresse l’artiste de son crayon, de sa gouache, de sa palette et de son pinceau? Un étrange et merveilleux livre d’art, qui accompagne une exposition, permet de se poser la question. Hiroshige. L’art du voyage, tel est le titre de cet ouvrage et de son exposition, que présente la Pinacothèque de Paris jusqu’au 17 mai 2013.

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C’est une occasion exceptionnelle de découvrir l’art du voyage au Japon, tel que l’a traduit le grand maître de l’estampe japonaise que fut Utagawa Hiroshige (1797-1858). C’est donc une triple découverte, celle d’un célèbre artiste japonais peu connu hors de son pays, celle de l’art de l’estampe avec ses nuances de couleurs, et celle d’aspects divers de la vie au Japon et de l’art d’y voyager à une époque où il était fermé aux étrangers.

Hiroshige

Hiroshige est, avec Hokusai (1760-1849), le peintre japonais le plus populaire au Japon, mais on ne le connaît guère à l’étranger. Né à Edo (actuelle Tokyo), il perd ses parents très jeune et délaisse la charge d’officier des pompiers du shogun, héritée de son père, pour s’orienter vers les arts, notamment à l’école du maître Toyohiro Utagawa (1773-1828).

Conformément à la tradition en vigueur, il s’intéresse d’abord aux estampes représentant des personnages, courtisanes, acteurs, guerriers. Il illustre aussi de livres et des surimono, de luxueuses estampes servant de cartes de vœux.

Les «Cinquante-trois étapes du Tôkaidô»

On sait que vers les années 1830, Hiroshige s’intéresse aux paysages et avec la série Cinquante-trois étapes du Tôkaidô (1833-1834), il fait entrer de manière remarquable l’estampe de paysage dans l’art japonais du XIXe siècle. L’exposition donne l’occasion de voir cette série, magnifiquement reproduite au complet dans le catalogue, qui donne la possibilité d’apprécier tous les détails.

L’artiste illustre les 53 relais qui jalonnent la route très fréquentée, de quelque 500 km, qui reliait Edo à Tôkaidô (Kyoto), la capitale impériale. Il s’y serait rendu avec un convoi de chevaux offerts à l’empereur.

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Il traduit ce qu’il a vu ou a imaginé seul ou à l’aide de documents préexistants à chacune des étapes de ce voyage. Même s’il a voyagé en septembre, Hiroshige représente des paysages aux différentes saisons, dans la tempête.

Il se fie autant à son génie qu’à la réalité et pourrait nous faire penser à ces photographies que des artistes photographes remanient de nos jours.

Toutes ces estampes se déroulent comme un carnet de voyage, dont l’auteur saisit les moments essentiels pour lui: paysages (montagnes, forêts, rivages, ponts…), voyageurs, auberges, maisons de thé, commerces, écuries, portefaix, passeurs de gué, etc.

Son style

«Sa mise en page est saisissante. Ces œuvres se caractérisent par la maîtrise subtile des couleurs franches — avec la domination du vert et du bleu — et son sens du premier plan, qui sera repris, plus tard, par Degas, et que l’on retrouvera en photographie.» (WKP)

«Ses estampes sont une merveille de réalisme poétique: le maître parvient à représenter un site réel de façon identifiable, tout en le baignant de cette aura poétique et mystérieuse inhérente à la nature.» (Jocelyn Bouquillard, Internet)

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Le livre d’art

Il présente encore d’autres estampes. Toutes sont magnifiquement reproduites et accompagnées d’une notice explicative. On peut ainsi les examiner à loisir et en détail pour apprécier le style, l’emploi des couleurs, la présence de personnage, les paysages. Pour s’initier à l’art japonais de l’estampe, c’est un livre merveilleux

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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