La saison des ventes de garage

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Publié 10/06/2008 par Martin Francoeur

Bon, d’accord. Je suis peut-être un peu en retard. Mais pas tant que ça. L’hiver ayant laissé traîner ses dernières lamentations jusqu’en avril, cela a évidemment eu des conséquences sur le printemps. Et même si l’été est à nos portes, on dirait qu’on est encore en pleine saison printanière.

Le printemps, c’est connu, c’est la saison des grands ménages. Et l’occasion devient souvent idéale pour se débarrasser de ce qu’on a de trop dans la maison, dans le sous-sol, dans le grenier ou dans le garage.

Depuis quelques années, la popularité des ventes de garage est en forte croissance et l’utilisation de cette expression l’est tout autant.

Mais elle est tout de même fautive. L’expression «vente de garage» est un calque de l’anglais «garage sale».

L’Office québécois de la langue française, dans son Grand dictionnaire terminologique, définit la «vente de garage» comme étant la «mise en vente, par un particulier, sur son terrain, d’objets dont il veut se défaire».

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On suggère également d’employer plutôt «vente-débarras».

Cette expression correcte, qui illustre très bien ce à quoi elle fait référence, gagne en popularité. Mais elle n’est pas la seule à pouvoir remplacer «vente de garage».

En France, on emploie depuis longtemps le terme «vide-grenier» pour désigner ce type d’événement, souvent convivial. Bien que reconnu dans les dictionnaires, ce mot composé est très peu employé chez nous, peut-être parce que les greniers sont rares ou qu’ils ne servent pas vraiment à remiser des objets que l’on n’utilise plus.

En Belgique, l’expression «vente de fond de grenier» serait commune pour désigner une telle vente.

Il est toutefois utile de noter que les «vide-greniers» se tiennent généralement dans un lieu public, par plusieurs personnes qui créent une vente commune.

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On en observe parfois dans des parcs, alors que des résidents d’un même quartier tiennent une telle activité. Certaines villes ou municipalités offrent aussi la possibilité à leurs citoyens de prendre part à un «vide-grenier» en fermant une rue pour en permettre la tenue.

Cette activité peut s’apparenter à ce qu’on appelle un «marché aux puces», qui n’est pas considéré comme un anglicisme même si l’équivalent anglais est «flea market».

Le marché aux puces est un marché d’objets anciens ou de curiosités qu’on achète d’occasion.

On remarque parfois l’emploi de «braderie» pour désigner une vente de garage mais à trop vouloir bien faire, en évitant par exemple l’anglicisme, on commet une autre erreur.

Le terme «braderie» est bel et bien accepté en français, mais il désigne une «liquidation de soldes en plein air», parfois organisée par plusieurs commerçants. Chez nous, on emploie souvent un autre anglicisme pour désigner un tel événement: vente-trottoir ou vente de trottoir. Mais ces deux mots sont des calques de «sidewalk sale»…

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Le terme «bric-à-brac», plus rarement employé pour désigner une vente de garage, n’est pas tout à fait juste.

Même si l’Office québécois de la langue française le reconnaît comme synonyme de «vente-débarras», le mot désigne en fait un amas d’objets usagés, entassés n’importe comment.

Quant à «brocante», encore plus rare, il réfère à la boutique du brocanteur, où l’on met en vente de vieux objets hétéroclites. Brocanteurs et antiquaires sont d’ailleurs souvent confondus.

Enfin, certains font remarquer que dans une «vente de garage», on peut s’attendre à trouver de tout sauf un garage. Contrairement à une vente de jouets, une vente de produits du terroir, une vente de meubles usagés, une vente de livres usagés.

À ce propos, certains remettent en question la condamnation de l’expression «vente de garage».

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Un professeur de français de l’Université du Québec à Trois-Rivières, Benoît Leblanc, écrit d’ailleurs: «Pour revenir à l’anglicisme vente de garage, il amène le raisonnement suivant: si l’on ne vend pas de puces au marché aux puces et que l’expression n’est pas critiquée, pourrait-on accepter le terme vente de garage à partir du même principe?»

La question se pose. D’autant plus que dans l’usage, l’expression «vente de garage» est tout de même difficile à déloger.

Auteur

  • Martin Francoeur

    Chroniqueur à l-express.ca sur la langue française. Éditorialiste au quotidien Le Nouvelliste de Trois-Rivières. Amateur de théâtre.

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