La preuve de fonds demandée aux immigrants: bouée de sauvetage ou épée de Damoclès?

Le niveau de vie élevé à Toronto constitue une caractéristique bien établie de cette ville dynamique et pose des défis financiers notables pour les nouveaux arrivants. L’exigence de la preuve de fonds, nécessaire à l’immigration, est conçue pour assurer que les immigrants disposent des ressources financières adéquates pour s’établir.

Cependant, les disparités significatives de coût de la vie entre Toronto et d’autres régions du Canada soulèvent une interrogation d’importance: ne serait-il pas judicieux pour le gouvernement de concevoir une preuve de fonds adaptable selon chaque ville?

Un nouvel arrivant à Toronto pourrait voir ses ressources se déployer de manière bien plus rapide qu’un individu s’installant dans le Nord de l’Ontario, par exemple.

Une exigence clé pour l’immigration via Entrée express

La preuve de fonds est un élément essentiel pour les candidats à l’immigration sous le volet Entrée express au Canada. Elle garantit que les nouveaux arrivants disposent de ressources financières suffisantes pour subvenir à leurs besoins initiaux.

Selon la dernière mise à jour d’Immigration Réfugiés et Citoyenneté Canada du 03 juin 2024, les montants requis varient selon la taille de la famille: pour une personne seule, il faut 14 690 $, pour un couple, 18 288 $, et pour une famille de trois, 22 483 $.

Ces fonds doivent être disponibles lors de la demande et à l’arrivée au Canada, assurant ainsi une intégration sans dépendre du système social canadien.

Pré-départ au Canada: sacrifices et changement de mode de vie

Les immigrants se répartissent en plusieurs catégories lorsqu’il s’agit de prouver leurs fonds pour immigrer au Canada. Ceux provenant de pays à devise forte trouvent souvent cette exigence plus aisée à satisfaire.

En revanche, pour d’autres, cette étape constitue un défi majeur. Nombre d’entre eux doivent travailler des heures supplémentaires, parfois dans plusieurs emplois, et réduire drastiquement leurs dépenses, sacrifiant confort et loisirs. Certains sont contraints de vendre des biens personnels tels que véhicules ou propriétés.

L’aide financière de la famille et des proches est également cruciale, illustrant solidarité et soutien communautaire.

Adil, nouvel arrivant à Toronto, explique comment le mode de vie avec sa famille a radicalement changé durant la période d’épargne pour la preuve de fonds.

«Nous sortions de moins en moins pour optimiser les dépenses, ce qui a impacté notre vie sociale et nos relations avec nos amis», explique-t-il.

«Heureusement, nous avons bénéficié d’un soutien familial. À la fin du processus d’immigration, nous avons dû vendre nos biens personnels, notamment nos voitures, pour compléter le montant exigé par IRCC.»

Les nouveaux arrivants face à la pression financière

Les immigrants qui s’établissent au Canada doivent allouer leurs preuves de fonds à diverses rubriques essentielles pour leur installation.

Le loyer, souvent accompagné du paiement du premier et du dernier mois à l’avance, constitue une part importante du budget.

Les vêtements d’hiver, indispensables dans un climat rigoureux, et les courses alimentaires, nécessaires dès les premiers jours, pèsent lourdement sur le budget.

Le transport, qu’il s’agisse de l’achat d’un véhicule ou d’abonnements aux transports en commun, est une dépense incontournable.

Enfin, l’acquisition de meubles et d’appareils électroménagers pour équiper le logement nécessite également une part significative des fonds.

«N’ayant ni historique de crédit au Canada, ni offre d’emploi, ni références, le propriétaire de mon appartement a exigé le paiement de six mois de loyer en une seule fois. Bien que cette pratique soit illégale, je n’avais pas d’autre choix. Ainsi, 70% de ma preuve de fonds ont disparu en quelques jours», souligne Mohamed Amine, nouvel arrivant à Toronto.

Toronto, la ville qui dévore les économies

Le montant de la preuve de fonds peut durer en moyenne jusqu’à six mois à Toronto, selon le montant disponible et le mode de vie de la personne.

À Toronto, les coûts élevés du loyer et des dépenses courantes épuisent rapidement ces fonds. En revanche, dans d’autres provinces où le niveau de vie est moins cher, notamment en ce qui concerne le loyer, ce montant peut durer huit mois ou plus.

Imane, influenceuse et immigrante à Toronto, ayant vécu au Nouveau-Brunswick, souligne à l-express.ca que dans d’autres provinces, le montant de la preuve de fonds peut durer presque deux fois plus longtemps qu’à Toronto.

«Ayant vécu dans les deux provinces et ayant de nombreux abonnés sur mes réseaux sociaux, j’ai toujours reçu des retours positifs sur le niveau de vie abordable au Nouveau-Brunswick, qui permet aux nouveaux arrivants de faire durer leur épargne plus longtemps. Cette différence s’explique principalement par le coût des loyers, nettement moins élevé qu’en Ontario», explique Imane.