La magie passe de la scène à la salle

The Magic Fire à Niagara-sur-le-lac

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Publié 08/08/2006 par Pierre Karch

À la fin de la Walkyrie de Richard Wagner, Wotan qui condamne sa fille Brunnhilde à un sommeil infini au haut d’une montagne, se repent et entoure sa fille d’un cercle de feu magique. Seul un héros véritable pourra le traverser, assurant ainsi à sa fille d’être secourue par un homme digne d’elle.

C’est ce à quoi renvoie le titre The Magic Fire de l’Américaine Lillian Groag, née en Argentine, qui a étudié en France et obtenu un doctorat en littérature française, ce qui explique certaines références à Proust et à la mémoire involontaire.

L’intrigue

L’action se passe dans la capitale de l’Argentine, Buenos Aires, quelques jours avant, puis après la mort d’Eva Peron. La narratrice et personnage central, Lise Berg se définit comme suit : «Je suis une immigrée dans un pays d’immigrés». Elle raconte son enfance, telle qu’elle l’a vécue, il y a 35 ans.

Cette enfance a été protégée par son père Otto, juif viennois (Ric Reid) et sa mère Amelia, catholique italienne (Sharry Flett), deux mélomanes cultivés, chacun ayant un faible pour les grands musiciens de son pays natal, soit Strauss soit Puccini et Verdi.

Les parents de Lise ont fui des pays fascistes. C’est sans doute ce qui les pousse à fermer les yeux sur les injustices sociales du régime tout aussi fasciste de Juan et d’Evita Peron. Le feu magique les protège des impuretés de l’extérieur de leur cercle que forme le clan familial. Mais non pas tout à fait, puisque le feu magique n’opère pas assez pour garder à distance quelques étrangers : un voisin (Dan Chameroy), la bonne (Waneta Storms) et un ancien ami (Jay Turvey).

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Douze comédiens se disputent la vedette. Ce serait beaucoup, s’ils ne réussissaient pas tous à briller sous les éclairages discrets de Louise Guinand.

La mise en scène

Jackie Maxwell, la directrice artistique du festival Shaw, assure la mise en scène qui tient parfaitement compte du petit espace que constitue le plateau du théâtre Court House.

Pour y arriver, elle a dû compter sur l’expertise de Sue Lepage dont les décors sont surtout des accessoires amovibles, ce qui convient tout à fait à une pièce en trois actes dont l’action se tient dans divers milieux.

Comme il y a plusieurs comédiens, chacun doit donner au texte qu’il livre, une vie tellement intense qu’on n’a aucun mal à les identifier.

Les comédiens

Deux actrices incarnent le rôle principal: Lise à sept ans (Lila Bata-Walsh) et Lise adulte (Tara Rosling). On ne peut qu’applaudir la plus jeune qui n’est ni ange ni bête et qui nous fait rire autant qu’elle nous étonne.

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J’ai toujours eu un faible pour Goldie Semple, depuis que je l’ai vue dans Camille. Elle continue de ne pas me décevoir ici, dans le rôle d’une comédienne qui refuse de mêler l’art à la politique. Elle a un de ces sourires qui nous renverse, car on sent sortir d’entre ses dents serrées une langue de vipère.

Chaque été, je me fais presque un devoir d’assister à une pièce dans laquelle joue Jennifer Phipps. Quel beau rôle que le sien, celui de la matriarche piémontaise qui, âgée de 91 ans, ne fait que mettre sa descendance dans des difficultés qui pourraient être graves.

Même en m’y forçant, je n’arrive pas à trouver un point faible à cette production à laquelle j’allais un peu de reculons à cause de certaines critiques.

Je me suis laissé gagner et je n’étais pas le seul, puisque les interprètes ont été ovationnés. Et ils le méritaient, ce qui n’est pas toujours le cas.

The Magic Fire, dans une mise en scène de Jackie Maxwell, au théâtre Court House, jusqu’au 11 octobre 2006. Billetterie: 1-800-511-SHAW ou www.shawfest.com

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