Six voix dévoilent les voies de la vie. Les règles du savoir-vivre dans la société moderne, présentée par la troupe de théâtre La Machine à Dire, au College Glendon jusqu’au 3 mai, est de ces pièces qui utilisent la légèreté pour soulever les pesanteurs du quotidien. Le metteur en scène Christophe Bauzet réussit une adaptation décapante du monologue de Jean Luc Lagarce, qui tire sur toutes les conventions sociales. Et vise juste!
La vie est une pièce de théâtre. Tout est orchestré pour éviter les fausses notes et pour parer à l’imprévu. Le souffleur est un pesant code du savoir-vivre qui dicte les paroles et les gestes à suivre, et les costumes sont les apparats de la courtoisie. Déguisements dotés chacun d’une lourde et apparente étiquette sociale. Le public? L’entourage, la famille, le parrain, la marraine, les autres, «je ne sais pas, n’importe qui».
La bienséance se met en scène. Jean-Luc Lagarce a écrit ce texte sachant qu’il allait mourir, et c’est à l’aube de la scène finale de son existence qu’il s’est posé cette terrible question: toutes ces bonnes manières sont-elles si utiles? Il y répond par un monologue saisissant et corrosif, non sans humour. Une énumération abyssale des règles du savoir-vivre qui donne le vertige.
À travers le rythme endiablé de son texte, l’absurdité des concordances se fait entendre. On dit qu’il faut être acteur de sa propre existence: c’est toujours mieux que d’en être le spectateur, certes, mais pourquoi ne pas en être le metteur en scène? Un acteur ne décide pas, il obéit, il feint, il joue un rôle.
Christophe Bauzet s’est justement proposé de mettre en scène et à nu cette théâtralisation de la vie. Après avoir analysé en profondeur le monologue, aidé de Marie-Christine Masson, il dégage six personnages. «C’est un découpage qui n’a rien du hasard, il fallait rendre le rythme, donner vie au texte.»