C’est le 10 janvier 1910 que Henri Bourassa fonde le quotidien Le Devoir, soit exactement cent ans passés. Il le dirige pendant vingt-deux ans et six mois, période au cours de laquelle il signe quelque 6 700 éditoriaux. L’historien Pierre Anctil, de l’Université d’Ottawa, les a tous lus et indexés, puis en a réunis et commentés 60 sous le titre Fais ce que dois (devise du journal).
Bourassa a créé un organe de presse entièrement à sa solde, un véhicule exclusif de sa pensée, «sans compromis ni édulcoration». Ses éditoriaux font étalage d’une érudition exceptionnelle en matière de politique canadienne et sont rédigés «d’une plume hautement littéraire, souvent très polémique, le plus souvent impitoyable pour ses opposants».
À travers les 60 éditoriaux retenus se profilent les moments forts de la pensée de Bourassa. On constate que le fondateur du Devoir se démarque par son double nationalisme, à la fois tourné contre la Grande-Bretagne sur la scène internationale et en faveur du fait français dans la sphère intérieure canadienne. Cela l’amène à réclamer «plus d’avantages pour la population canadienne-française et pour l’Église catholique de langue française».
Le Devoir suit de près la crise scolaire en Ontario et Règlement 17 de 1912 devient «l’occasion d’un sursaut d’émotivité très intense». Le journal n’hésite jamais à rappeler les exactions et les abus de pouvoir dont souffrent les Franco-Ontariens.
Entre 1910 et 1919, Le Devoir publie 241 éditoriaux qui dénoncent «l’intransigeance linguistique anti-francophone systémique» en Ontario.