Gaspillage alimentaire : attention aux chiffres

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Environ 11% du gaspillage viendrait des ménages. Infographies: Steve Proulx, 37e avenue Agence Science-Presse
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Publié 06/10/2021 par Ève Beaudin

On rapporte volontiers, en citant les Nations Unies, que le près du tiers de toute la production alimentaire est gaspillée. Ce serait énorme. Vérifions d’où provient cette autre statistique gonflée.

Selon les plus récentes données, on identifie deux formes de « gaspillage », soit :

  • Les pertes alimentaires : l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) mesure les aliments perdus durant les étapes de la production agricole et de la distribution (stockage, transport, etc.). Selon le dernier rapport de la FAO (2019), environ 14% des aliments produits dans le monde sont perdus avant même d’arriver sur le marché.

  • Le gaspillage alimentaire : selon le dernier rapport sur l’indice du gaspillage alimentaire du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), après leur commercialisation, pas moins de 931 millions de tonnes d’aliments auraient été mises aux poubelles par les ménages, les services alimentaires et les détaillants en 2019, ce qui représente 17% de la production alimentaire (illustration ci-dessous).

C’est probablement en additionnant ce 17% et ce 14% que certains arrivent à la conclusion que le « tiers des aliments est gaspillé ».

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Cette estimation manque toutefois de nuances.

Attention à l’addition de ces données

Il est tentant d’additionner les données compilées par la FAO à celles qu’on retrouve dans le rapport du PNUE. Mais cela n’est pas conseillé, comme le soulignent les deux organisations dans leurs derniers documents.

D’une part, l’évaluation de la FAO n’a pas la même portée que celle du PNUE. Par exemple, la FAO prend en compte toute la production agricole et inclut non seulement les pertes de denrées alimentaires. Mais aussi les aliments pour animaux qui sont jetés, les semences qui sont perdues, etc.

Le PNUE, en revanche, exclut de ses calculs les aliments qui ne sont pas destinés à la consommation humaine.

Enfin, l’estimation de la FAO ne comprend pas les parties non comestibles des aliments qui sont jetés (!). Alors que les données du PNUE en tiennent compte.

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Une seule étude datant de 10 ans

Certains feront valoir que le rapport remis à la FAO en 2011 par l’Institut suédois pour l’alimentation et la biotechnologie, estimait qu’environ un tiers des aliments produits pour la consommation humaine (parties comestibles) était, à l’échelle mondiale, perdu ou gaspillé.

Ce qui correspondait approximativement à 1,3 milliard de tonnes de nourriture par an.

Cette estimation inclut toutes les étapes de la chaîne d’approvisionnement, de la production agricole jusqu’à la consommation.

À ce jour, cette étude datant de 10 ans est la seule à fournir des estimations mondiales à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement. Et à couvrir tous les secteurs de la production alimentaire.

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La mesure d’un tiers d’aliments «gaspillés» sert surtout à lancer une discussion. Photo: FAO

Pour attirer l’attention sur le gaspillage alimentaire

« Elle était utile pour donner une indication approximative de l’ampleur des pertes et du gaspillage de denrées alimentaires et attirer l’attention sur ce phénomène, mais elle demandait également la plus grande prudence dans l’interprétation des résultats », peut-on lire dans le dernier rapport de la FAO.

La FAO et le PNUE collaborent pour trouver à l’avenir des moyens de combiner leurs deux indicateurs.

En attendant, il reste difficile de dire exactement dans quelle proportion la production alimentaire globale est gaspillée. Surtout que la production elle-même, de même que son rendement, sont en hausse constante depuis des décennies.

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Le rendement des 10 principaux aliments cultivés dans le monde depuis les années 1960.

Auteur

  • Ève Beaudin

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada et la seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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