C’est une histoire extraordinaire que celle des tableaux religieux qui traversèrent l’Atlantique pour se retrouver en grand nombre au Québec à la faveur de la Révolution française. Elle prend vie cet été au Musée national des beaux-arts du Québec (MNBAQ) avec l’exposition Le fabuleux destin des tableaux des abbés Desjardins et le superbe livre d’art qui l’accompagne.
Il faut avoir une idée de ce qui se passe en France depuis la Révolution de 1789: dès l’année suivante, les révolutionnaires au pouvoir prennent une série de mesures contre l’Église catholique, notamment la Constitution civile du clergé, qui soumet l’Église au pouvoir civil.
Puis, les prêtres sont déclarés inaptes à tout service civil public, les églises sont fermées ou transformées en temples de la Raison et leurs objets détruits ou enlevés et mis en dépôt, comme les tableaux religieux. Les prêtres réfractaires se cachent ou fuient vers l’Angleterre, alors que d’autres sont massacrés.
Et les tableaux qui arriveront finalement au Canada sont, en quelque sorte, un fastueux héritage de la Révolution française: près de 200 de ces tableaux, exécutés pour des églises de Paris aux XVIIe et XVIIIe siècles par des peintres renommés, saisis lors de l’anticléricalisme révolutionnaire.
Les Desjardins
Parmi les ecclésiastiques qui ont fui en Angleterre se trouvaient les frères Desjardins, Philippe-Jean-Louis (1753-1833) et Louis-Joseph (1766-1848). En 1793-1794, ils répondent à l’invitation de l’évêque de Québec, Jean-François Hubert, qui, encouragé par le gouvernement britannique, accepte tous les prêtres exilés qui veulent servir l’Église catholique dans la colonie canadienne.