Fantastique!

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Publié 13/10/2015 par Gabriel Racle

Fantastique!, c’est bien le titre d’une exposition exceptionnelle qui se tient au Petit Palais de Paris jusqu’au 31 janvier 2016 et que l’on ne manquera pas de découvrir sur place, ou chez soi grâce aux deux superbes livres qui l’accompagnent.

Nous avons déjà présenté le Petit Palais et ses richesses, dernièrement ses prodigieuses tapisseries (L’Express du 4 août 2015). Il s’agit cette fois d’estampes et d’estampes fantastiques présentées simultanément en deux expositions: L’estampe visionnaire, de Goya à Redon et Kuniyoshi, le démon de l’estampe. Ces titres sont également ceux des deux ouvrages d’art publiés en conjonction avec les expositions.

Le Petit Palais ajoute que la présentation de l’estampe fantastique au XIXe siècle à travers un duo d’expositions permettra la confrontation du noir et blanc et de la couleur! Un intérêt de plus. En effet, si les œuvres du «démon de l’estampe» éclatent de couleurs flamboyantes, celles de «l’estampe visionnaire» sont toutes en noir et blanc. Le visiteur ou le lecteur appréciera.

«Il faut respecter le noir. Rien ne le prostitue. Il ne plaît pas aux yeux et n’éveille aucune sensualité. Il est agent de l’esprit bien plus que la belle couleur de la palette ou du prisme.» (Odilon Redon, À soi-même, Journal) Pierre Soulages, peintre du noir-lumière ou de l’outrenoir, a dû s’en souvenir.

L’estampe visionnaire

Le fantastique, au singulier et au sen large d’imaginaire, a toujours suscité des productions artistiques, surtout au XIXe siècle, et l’estampe a été le moyen préféré des artistes pour montrer des univers invisibles, effrayants, et des monstres dans des scènes cauchemardesques.

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L’exposition propose un parcours chronologique, qui explore l’évolution de l’inspiration fantastique au fil des générations d’artistes.

La première génération, romantique, d’Eugène Delacroix (1798-1863, L’Express du 13 août 2013, Grand-maître de la peinture romantique française) a été marquée par Les Caprices de Goya (1746-1828, L’Express du 8 février 2011, Des monstres et des hommes), une satire de la société espagnole de la fin du XVIIIe siècle, et l’omniprésence du diable.

Une autre partie est consacrée au néoromantisme représenté par Gustave Doré (1832-1883, L’Express du 8 juillet 2014). Ses compositions inspirées de L’Enfer de Dante (1265-1321, L’Express du 2 juin 2015) sont éditées en 1861.

Une présentation du symbolisme inauguré par Odilon Redon (1840-1916) termine cette série avec Dans le rêve, sa première création. On le considère «comme l’une des personnalités les plus riches et les plus complexes du XIXe siècle, créateur de formes et d’harmonies nouvelles dans le dessin, l’estampe, la peinture et l’art décoratif.»

L’ouvrage d’accompagnent de la Bibliothèque nationale de France (relié, 28×24 cm, 191 p.) présente quelques 200 estampes fantastiques parmi les 270 de l’exposition, généralement en pleine page, réparties en quatre chapitres avec de très courts textes explicatifs. Ce sont les estampes en noir et blanc qui tiennent la vedette.

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C’est donc un ouvrage unique qui n’a pas son pareil. C’est aussi un livre à ne pas lire avant d’aller dormir si l’on ne veut pas passer une nuit entrecoupée des cauchemars que suggèrent ces estampes diaboliques parfois, fantastiques toujours. De quoi broyer du noir!

Le démon de l’estampe

Cette exposition présente près de 250 œuvres évoquant l’univers flamboyant de cet artiste japonais hors du commun, qui a largement influencé l’art du manga et du tatouage. Kuniyoshi (1797-1861) est l’un des derniers grands maîtres japonais de l’estampe sur bois. Il aurait produit environ dix mille estampes, ce qui explique sans doute le titre de son exposition.

Kuniyoshi n’était pourtant pas aussi connu en Occident que d’autres artistes japonais, comme Hiroshige (1797-1858) ou Hokusai (1760-1849, L’Express du 8 janvier 2013), même s’il a inspiré Monet ou Rodin. Cette exposition et son livre d’art offrent l’occasion de découvrir cet artiste non conformiste.

Comme l’indique Connaissance des arts sous le titre: «Les visions démoniaques de Kuniyosh. Guerriers, animaux anthropomorphes, squelettes… le monde fantastique d’Utagawa Kuniyoshi (1797-1861) dynamite allègrement l’image zen que l’on peut avoir de l’estampe japonaise.»

Grâce à d’importants prêts du Japon et d’établissements français, les 250 œuvres présentées témoignent de son génie. «Les paysages bucoliques sont plutôt rares dans l’univers déjanté de Kuniyoshi. Contemporain d’Hokusai et d’Hiroshige, l’artiste surprend par son anticonformisme et son génie dramatique… Surprise assurée!»

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Et cette surprise on l’aura aussi en découvrant le superbe livre que le Petit Palais consacre à Kuniyoshi (couverture souple en couleur, broché, 28×24 cm, 301 p.), c’est le livre d’art japonais de l’année.

Après quelques pages consacrées au Maître de l’étrange, les reproductions suivent toujours en couleur (n’en déplaise à Odilon Redon) à chaque page, classées par catégorie, pax exemple, Légendes guerrières et dragons, Au bord de l’eau, Jeux et caricatures. On passera du temps à regarder ces œuvres étranges, ces assemblages de couleurs, ces reproductions fantasmagoriques, pour découvrir les messages invisibles, comprendre l’incompréhensible.

Le démon de l’estampe ou les estampes du démon? À chacun de juger en parcourant ce livre mystérieux et merveilleux.

Auteur

  • Gabriel Racle

    Trente années de collaboration avec L'Express. Spécialisé en communication, psychocommunication, suggestologie, suggestopédie, rythmes biologiques, littérature française et domaine artistique. Auteur de très nombreux articles et d'une vingtaine de livres dont le dernier, «Des héros et leurs épopées», date de décembre 2015.

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