Être et perdre, les deux côtés d’une même médaille

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Publié 31/05/2011 par Paul-François Sylvestre

Avec seize romans, sept recueils de nouvelles, un récit et cinq chroniques, toujours bien accueillis par la critique, Gilles Archambault est un monument de la littérature québécoise.

Sa plus récente création est un recueil de 17 nouvelles regroupées sous le titre d’Un promeneur de novembre. Autant de variations sur un thème unique, une vérité unique que l’auteur emprunte à Miguel Torga: «Exister, c’est perdre, petit à petit.»

Et perdre, c’est être seul, de plus en plus. Dans une nouvelle, on sympathise avec un homme devenu un père maladroit après avoir été un mari imprévisible.

Puis on fait la connaissance d’une femme divisée entre l’amour qu’elle porte à sa progéniture et le regret d’avoir gaspillé sa vie en enfantant…

On croise aussi un homme qui aime mettre les cartes sur tables. «Je suis avant tout un copain, je baise si tu veux, mais ne va rien t’imaginer. (…) Je me défile à la moindre occasion.»

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Plus loin, on rencontre un homme qui n’a que 35 ans mais pour qui rien ne paraît plus possible; il ne croit plus au travail, il a lamentablement raté sa vie de couple. À l’inverse, il y a aussi ce personnage pour qui tout est peut-être possible, «tout, c’est-à-dire presque rien, une présence, une phrase banale, un sourire.»

Ce bref survol peut laisser croire que le désespoir règne allègrement dans ces nouvelles de Gilles Archambault. Pas du tout! Ni la révolte ni le cynisme n’y trouvent place. L’auteur se range plutôt du côté de l’acceptation lucide et modeste de l’inévitable, forme ultime de la dignité et de la beauté.

Même si chaque personnage éprouve pour lui-même le sentiment, voire la certitude, de sa propre défaite et de la solitude grandissante où l’existence l’a jeté, cette défaite et cette solitude n’empêchent pas que subsiste toujours, quelque part, une dernière lueur, une dernière tendresse, un dernier souvenir de bonheur.

Dans la vie, la destruction demeure inéluctable. L’ironie de la vie prend tantôt des accents cruels, tantôt des traits risibles, mais il arrive aussi que le naufrage ne soit pas sans douceur… Les mots d’Archambault ont l’art de capter cette heureuse réalité de la vie.

Je ne sais pas si j’ai mal lu ou mal compris la nouvelle intitulée Angoisse, mais toujours est-il que le récit m’a semblé graviter autour de deux personnages: Michel et Antoine. Or, dans un paragraphe, on passe soudainement d’Antoine à Alexandre… Étrange revirement, me suis-je dit. Est-ce que l’auteur aurait d’abord écrit le prénom Alexandre dans une première version de la nouvelle, puis opté pour Antoine, en oubliant de faire le changement dans ce paragraphe à la page 18…?

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Quoi qu’il en soit, ces nouvelles illustrent bien à quel point la vie nous conduit peu à peu sur la voie de la destruction. Comme le dit le vieil homme qui se promène dans les rues de Montréal un jour de novembre, «détruit, on le devient peu à peu; pour cela, il suffit de vivre».

Gilles Archambault, Un promeneur en novembre, nouvelles, Montréal, Éditions du Boréal, 2011, 240 pages, 22,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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