S’il est une année tout indiquée pour cueillir quelques brins de poésie, c’est bien cette année 2007: déclarée officiellement Année René Char, du nom de ce grand poète français, elle célèbre le centenaire de sa naissance, mais elle commémore aussi le 150e anniversaire de la publication des Fleurs du mal, de Charles Baudelaire, et le 100e anniversaire du décès (6 septembre 1907) de Sully Prudhomme, qui a écrit un jour: «La poésie, c’est l’univers mis en musique par le cœur.»
Certes, la poésie n’a pas toujours bonne presse, pour les uns elle remémore des souvenirs scolaires, pour d’autres elle relève d’une élite intellectuelle seule apte à en saisir le sens, pour certains elle n’évoque qu’un idéal abstrait peu prometteur.
Mais elle a ses amoureux, pour lesquels elle exalte une magnificence et une munificence incomparables. Il faudrait peut-être simplement se laisser guider par des poètes comme Baudelaire et Char, pour se faire une idée de ce qu’elle est et de ce que cet art du langage nous apporte d’inutile et de suprême. Peut-être le poète est-il un peintre, qui joue avec toutes les couleurs de sa palette pour nous offrir un tableau qui nous touche, nous plaît ou nous émeut?
Lorsqu’il publie les Fleurs du mal, en 1857, Baudelaire (1821-1867) introduit une conception moderne de la poésie en fondant ce que l’on peut qualifier de nouvelle esthétique. Tout en utilisant des formes poétiques traditionnelles, il transforme le genre poétique pour réaliser une «transmutation» du monde réel, créer (au sens étymologique du grec poiein, qui signifie «créer») un langage poétique qui soit «sorcellerie évocatoire», le révélateur des «correspondances» mystérieuses existant dans le monde.
Cocteau a dit un jour: «Voilà le rôle de la poésie. Elle dévoile dans toute la force du terme. Elle montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement.»