Deux auteurs font dialoguer les langues

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Publié 23/05/2006 par Marta Dolecki

Barrière de langue oblige, les ouvrages des grands poètes français qui traversent l’Atlantique arrivent au Canada anglais imprimés dans la langue de Shakespeare. Hugo, Prévert, Baudelaire… Dans la conscience populaire, leur nom est parfois venu se perdre au profit de celui du traducteur, scribe patient qui a converti leurs vers dans un langage familier pour les lecteurs d’ici.

Quand le Torontois Thomas Scott dévorait avec enthousiasme des poèmes à la fois puissants et limpides qui, au détour d’une rime, venaient lui chatouiller l’oreille, il était persuadé d’avoir à faire à un certain Lawrence Ferlinghetti. Quel génie, quelle manière de jouer avec la langue, s’était-il dit au passage.

«Je suis littéralement tombé amoureux de ce recueil», raconte-t-il aujourd’hui. Ce n’est que des années plus tard qu’il a découvert que le poète à l’origine de son coup de coeur n’était nul autre que le Français Jacques Prévert. Lawrence Ferlinghetti était quant à lui bien Américain. Seulement, Outre-Atlantique, il comptait parmi les traducteurs les plus connus de Prévert.

Cette anecdote, en apparence bénigne, illustre en réalité la relation symbiotique qui lie l’auteur à son traducteur. Bien plus tard, quand Thomas Scott a voulu publier son premier recueil de poèmes, il a demandé à son ami Daniel Soha de l’aider avec la partie française. Scott devint à son tour le poète et Soha se glissa avec discrétion dans la peau du traducteur.

Mardi dernier, Thomas Scott et Daniel Soha étaient réunis lors d’une soirée littéraire organisée par l’Alliance française. Devant une vingtaine de personnes, ils se sont adonnés à la lecture des poèmes de M. Scott, et ce, aussi bien dans la langue de Molière que dans celle de Shakespeare.

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Le recueil de Thomas Scott, intitulé Mode d’emploi pour un mur vide, comporte 64 poèmes qui, explique l’auteur, portent moins sur des thèmes particuliers que des humeurs du moment allant du regret au désir en passant par la gaieté et l’enjouement.

Daniel Soha et Thomas Scott ont profité de cette lecture pour faire quelques apartés sur le travail effectué autour de la traduction. Ils ont affirmé qu’au cours de ce même processus, leurs deux écritures se sont informées l’une l’autre.

Ainsi, sous l’impulsion de la traduction française, Thomas Scott en est venu à clarifier sa propre pensée. Cette curieuse dialectique d’une langue à l’autre a ainsi conduit le poète à altérer certains passages en anglais, afin qu’ils reflètent mieux ce que la partie française énonçait de façon plus précise.

Quant à Daniel Soha, il affirme que ce travail sur la poésie de son ami a été pour lui était une belle leçon d’humilité.  «Le poème est déjà là. Vous n’avez plus qu’à le couler dans un moule. Le genre même vous donne une immense liberté. La traduction doit toujours -ressembler au poème original, mais vous pouvez jouer avec les idées les rythmes, le son. Le produit final est donc une oeuvre indépendante et ne doit pas sentir la traduction», a-t-il expliqué en entrevue.

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