Hosanna, la pièce de Michel Tremblay créée il y a déjà 33 ans, garde toute sa force et son impact. On s’en rend compte en allant voir au Young Centre for the Performing Arts (La Distillerie) le spectacle proposé ces jours-ci (en version anglaise) jusqu’au 28 octobre par John Van Burek, le directeur du Pleiades Theatre.
L’intérêt de la pièce ne tient pas tant à la situation marginale des deux protagonistes homosexuels qui, à l’époque de la création, pouvait apparaître provocatrice mais dont l’effet de scandale a été fortement émoussé par l’évolution des mœurs.
La pièce reste d’actualité par la profondeur psychologique des personnages, leur présence, l’émotion qui se dégage de la tension des dialogues. Le texte fortement organisé utilise un temps théâtral où le passé fait irruption dans le présent et se caractérise par une langue drue, populaire, porteuse d’images et de rêves, révélatrice de la vérité des personnages et dont la traduction anglaise sait subtilement donner des équivalents.
La pièce présente deux homosexuels, Claude et Raymond, qui ne vivent à Montréal que sous leur nom d’emprunt: Hosanna et Cuirette. Lorsque la pièce commence, Hosanna revient, le soir d’Halloween, de la traditionnelle soirée costumée des drag queens, habillée en Cléopâtre mais elle vient de subir une terrible humiliation et la présence de son compagnon ne pourra la calmer, bien au contraire, puisque, d’une certaine façon, il a participé à la trahison.
Dès lors commence – c’est la première partie de la pièce – un dialogue serré, vif, incisif qui ressemble fort à un règlement de comptes où chacun s’emploie à jeter à la face de l’autre des reproches et des vérités qui font terriblement mal. Alors qu’elle se sent abandonnée (en pleine nuit Cuirette décide d’aller «au party» de la concurrente Sandra), Hosanna revit douloureusement devant nous, dans un monologue vertigineux, ce qu’a été dans cette soirée d’Halloween, la honte de sa vie, la destruction de son rêve, le fatal incident.