Chrystine Brouillet, gourmande et fin gourmet

L’amitié se bonifie comme les grands crus

livre
Chrystine Brouillet, Chambre 1002, roman, Montréal, Éditions Druide, coll. Reliefs, 2018, 346 pages, 24,95 $.
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Publié 19/09/2018 par Paul-François Sylvestre

La romancière la plus prolifique du Québec est sans contredit Chrystine Brouillet. En arrondissant les chiffres, son 50e roman paraît en librairie aujourd’hui. Pas d’inspectrice Maud Graham cette fois, plutôt un paradoxe de paix et d’excitation où les gourmets feront bombance.

«Tout aurait été tellement plus simple si elle était morte dans ce maudit accident!» Mais alors, il n’y aurait pas eu une histoire à raconter, une femme à l’hôpital dans la Chambre 1002, titre du tout dernier roman de Chrystine Brouillet.

Cette femme est Hélène Holcomb, chef montréalaise mondialement connue, à la tête du restaurant Strega, mot italien qui signifie sorcière ou magicienne, exactement ce qu’est Hélène qui se rend à New York pour recevoir un prestigieux prix culinaire et subir, sur le chemin du retour, un brutal accident qui la plonge dans un profond coma.

Cinq Muses

Pendant que la police mène son enquête, les amies d’Hélène se relaient à son chevet.

La romancière décrit ainsi ces cinq Muses: «la chaleur de Marie, la fantaisie de Gabrielle, la vivacité de Viviane, la constance d’Ornella, la douceur de Justine». Elles pratiquent l’aromathérapie en préparant des plats aux parfums appétissants, en les lui faisant sentir dans l’espoir que ces odeurs l’éveilleront.

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La liste des plats préparés dans ce roman occupe facilement 50 pages. L’auteure parsème son récit de 20 recettes détaillées (ingrédients et mode de préparation).

Je retiens le dernier menu à la dernière page du roman: «des verrines de pétoncles aux fraises d’automne, des cuillères de tartare de crevettes et d’oursins cachés sous des feuilles de nori, une burrata aux dés de citron et sa salade de fenouil qui précéderaient le pigeonneau à la rhubarbe, sans oublier les ramequins de caviar au jambon fumé et aux œufs bénédictine…»

Chrystine Brouillet écrit que les repas servis dans un hôpital sont ternes et dégagent «une odeur de carton bouilli». Et une infirmière d’ajouter que «c’est conçu pour qu’on n’ait pas le goût de rester ici».

Pervers narcissique

Les amies et les mets sont savoureux, mais le tout est bon et le tout le monde est fin ne font pas un roman. Il faut «un pervers narcissique qui ne supporte pas d’être rejeté». Séducteur et paresseux, Julius «dégouline de gentillesse» lorsqu’il apprend le sort d’Hélène, sa tante et marraine.

Brouillet a écrit un roman sur l’amitié qui lie une chef et cinq Muses, sentiment qui s’enrichit «de leurs différences, de la variété de leurs univers», et qui se bonifie, comme les grands crus, avec le temps.

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Il faut être gourmand et gourmet pour apprécier toutes les facettes du roman Chambre 1002. Soyez prêts à participer «à la cueillette des iris sur les plateaux du Moyen Atlas, à celles des tubéreuses à Coimbatore, de l’ylang-ylang dans l’archipel des Comores et de ces thés verts» au Japon.

La plume de Chrystine Brouillet ressemble à ces feuilles de thé qui vous mettent «dans une état à la fois de paix et d’excitation». Heureux paradoxe!

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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