À l’occasion, on tombe sur un disque qui semble émaner d’une plaie vive, du genre que seul peut produire un artiste qui a compris que l’importance d’honorer ses racines («Cet album est dédié à ma mère, ma grand-mère et mon oncle») n’exclut pas, à intervalles réguliers, le besoin de noyer sa mélancolie dans le gros rouge et la musique. Balbino Medellin est Gitan dans les chromosomes et jusqu’au bout de ses doigts de guitariste, mais Gitan de Paname (Barclay/Universal Special Imports) dépasse largement les paramètres qu’on associe au genre.
S’il tutoie la solitude des amoureux («J’sais pas si c’est Pigalle ou tes yeux qui me manquent le plus ce soir»), Balbino ne la chante pas en solitaire, loin de là: sur ce premier album, ses compagnons de route ont pour noms Michel Gaucher, dont le saxo commet un solo tonitruant sur A Chi Li Pu, Régis Gizavo, le roi de l’accordéon malgache, ou encore Brad Scott, l’ancien contrebassiste de Bashung et d’Arthur H.
Quant à ses anges gardiens, ils s’appellent Sergent Garcia, Bernard Lavilliers et Mano Solo, dont Balbino partage la fougue poétique et les penchants jusqu’au-boutistes. Autant dire que Gitan de Paname est né sous une bonne étoile, même si sa lumière semble parfois provenir de ces réverbères où les filles de la nuit – dont il a gardé le souvenir attendri – font le pied de grue.
Que ceux qui en ont soupé des clichés manouches se rassurent: d’entrée de jeu, Balbino Medellin n’a pas peur de chanter haut et fort qu’il n’aime pas les Gypsy Kings, et ses chansons nous démontrent qu’il a infiniment plus à nous offrir, tant dans le regard que dans la voix.
Le cas Kad
Au départ, cela semble plutôt prometteur: Kad a la moustache, la gueule et la dégaine du voyou dandy (à une autre époque, on l’aurait qualifié d’Apache), du genre qui est capable de porter un veston de velours mauve comme vous et moi portons un T-shirt.