Campagne électorale: c’est fait pour débattre

Jagmeet Singh, Elizabeth May, Justin Trudeau, Maxime Bernier, Yves-François Blanchet, Andrew Scheer.
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Publié 21/08/2019 par François Bergeron

L’éphémère première ministre Kim Campbell s’était attiré une volée de bois vert pour avoir dit qu’une campagne électorale n’est pas un bon moment pour discuter d’enjeux sérieux.

Au contraire, c’est le meilleur moment, le plus fort en démocratie, avaient rétorqué ses adversaires. C’est ce que je pense aussi, et c’est certainement ce que pensent les nombreux groupes d’intérêts économiques et communautaires qui s’activent et dépensent parfois beaucoup d’argent pour tenter d’influencer le choix des électeurs. C’est parfaitement légitime.

Parmi ces groupes, mentionnons la FCFA, le lobby politique des francophones hors Québec, qui propose une modernisation de la Loi sur les langues officielles, et qui compte bien se faire entendre au cours des prochaines semaines.

La question de l’urne

C’est pourquoi Élections Canada, l’agence qui supervise le scrutin fédéral du 21 octobre prochain, a fait tiquer bon nombre d’activistes et de commentateurs, ces derniers jours, en avertissant plusieurs groupes écologistes qu’ils devront faire attention à ce qu’ils diffusent sur les changements climatiques à partir du moment où la campagne sera officiellement déclenchée.

Certains pensent/souhaitent que cet enjeu mondial pourrait devenir «la question de l’urne», c’est-à-dire le sujet qui préoccupera le plus grand nombre d’électeurs canadiens. Cela avantagerait les Libéraux, qui conserveraient le pouvoir, ainsi que les Verts, qui gagneraient des sièges.

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Attention: c’est ce que tout le monde prédisait aussi cet été en Australie. Mais les électeurs ont plutôt manifesté leur agacement face aux maniaques du climat en réélisant le parti qui osait prioriser des enjeux plus prosaïques: emploi, santé, éducation, sécurité…

À cause d’un seul parti

Même si les messages des environnementalistes canadiens n’identifiaient aucun candidat ou parti politique, ils pourraient être comptabilisés comme «dépenses électorales» et soumis aux limites prévues. C’est abusif: il faudra revoir tout ça.

Élections Canada a justifié sa mise en garde en soulignant que le Parti populaire de Maxime Bernier conteste le sentiment d’urgence face aux changements climatiques, qu’il estime largement naturels et pas catastrophiques (c’est ma position personnelle également). Toute publicité alarmiste devrait donc s’arranger pour ne pas inciter les citoyens à voter contre lui… comme les promoteurs de pipelines ne devraient pas paraître s’engager pour lui ou pour les Conservateurs.

Ironiquement, alors que plusieurs commentateurs poussaient de hauts cris autant contre Élections Canada que contre Maxime Bernier, ce dernier, en toute logique libertarienne, s’est solidarisé des Greenpeace, Équiterre et autres Fondation Suzuki qui voudraient diffuser un message contraire au sien pendant la campagne électorale.

Invitez Maxime Bernier aux débats des chefs

Dans le même ordre d’idées, Maxime Bernier réclame que les organisateurs des deux débats télévisés des chefs prévus avant le 21 octobre, un en français et l’autre en anglais, reviennent sur leur décision de l’exclure de ces tribunes importantes.

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Maxime Bernier siège au Parlement depuis 2006, même s’il n’y a pas été élu sous la bannière de sa toute nouvelle formation politique. Son parti présente des candidats dans toutes les régions du pays, éventuellement dans toutes les circonscriptions, contrairement au Bloc québécois d’Yves-François Blanchet, confiné dans une seule province, et inutile, franchement, dans le débat anglophone.

«Mad Max» ne dépasse pas 2% des intentions de vote dans les sondages. Mais il a été ministre, contrairement à Jagmeet Singh (NPD) et Elizabeth May (Vert). Et, il y a deux ans, il s’en est fallu de peu qu’il soit élu chef du Parti conservateur au lieu d’Andrew Scheer… au 13e tour de scrutin après avoir été premier aux 12 tours précédents.

Oui, quelques-uns de ses candidats sont bizarres: Renata Ford, la veuve de l’ancien maire Rob Ford, à Etobicoke! Mais quand on cherche, on trouve des drôles d’oiseaux dans tous les partis. Un candidat du Bloc à Montréal a été, jusqu’à tout récemment, chef du Parti communiste du Québec… pendant 21 ans!

Populisme interdit

Surtout, le programme du PPC se démarque radicalement – notamment sur l’immigration et sur le climat – de celui des autres partis politiques fédéraux, qui cherchent tous, plus ou moins sincèrement, à se rapprocher du «centre» occupé par les Libéraux de Justin Trudeau. Maxime Bernier a raison de dire que ce ne sera pas un vrai débat sans lui.

On comprend que c’est surtout Andrew Scheer qui a avantage à faire disparaître Maxime Bernier, qui cible d’abord ses électeurs. Mais il a la décence de ne pas insister et de s’en remettre au jugement des organisateurs des débats.

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C’est Jagmeet Singh qui s’est discrédité en s’opposant à la présence de Maxime Bernier en raison de son programme «populiste», indigne de liberté de parole selon lui. C’est la manifestation d’une tentation totalitaire malheureusement pas si rare chez les socialistes.

Que tous les courants politiques s’expriment, y compris les plus originaux.

Auteur

  • François Bergeron

    Rédacteur en chef de l-express.ca. Plus de 40 ans d'expérience en journalisme et en édition de médias papier et web, en français et en anglais. Formation en sciences-politiques. Intéressé à toute l'actualité et aux grands enjeux modernes.

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