Bilan de l’année politique 2024 à Ottawa

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Les chefs politiques canadiens. Photo-montage: Francopresse
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Publié 11/12/2024 par Geneviève Tellier

Il ne reste que quelques jours de travaux à la Chambre des communes. Plusieurs pensent qu’une pause sera bienvenue pour calmer les esprits. C’est que le ton des débats politiques demeure acrimonieux, malgré les nombreux rappels à l’ordre du président de la Chambre.

Certes, on n’a plus entendu le fameux «wacko» que Pierre Poilievre a lancé à Justin Trudeau au printemps dernier, et qui lui avait valu son expulsion de la Chambre. Mais on ne sent pas non plus une volonté de baisser le ton.

Gouvernement zombie

Les partis d’opposition ont devant eux un gouvernement fragilisé qui manifestement sera battu aux prochaines élections. Du moins, c’est ce que nous disent systématiquement les sondages, mois après mois, depuis plus d’un an.

Mais les Libéraux n’ont pas encore jeté l’éponge. Même s’il ne fait plus autant l’unanimité auprès de ses troupes qu’auparavant, Justin Trudeau compte bien être là lors de la prochaine campagne électorale. Mieux encore, son parti semble avoir maintenant accepté le fait que le premier ministre sollicitera un quatrième mandat.

La crise qui a secoué le Parti libéral cet automne n’aura donc été que passagère. Du moins en public, car en privé on sent que plusieurs se préparent à une future course au leadership.

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Plusieurs ont interprété ainsi la publication la semaine dernière d’un article du New York Times consacré à la ministre Mélanie Joly. On y peignait le portrait d’une battante qui pourrait possiblement succéder à Justin Trudeau.

colline, Trudeau
Le premier ministre Justin Trudeau. Photo: Inès Lombardo, Francopresse

L’année 2024, celle des Conservateurs

Le chef conservateur, Pierre Poilievre, a réussi à asseoir solidement – pour ne pas dire fermement – son autorité à la tête de son parti.

Il est aussi parvenu à se faire connaître de la population. Les Canadiens savent maintenant très bien qu’il est contre les taxes – surtout la taxe carbone –, qu’il veut régler en priorité la crise du logement et qu’il veut combattre la criminalité, notamment celle en lien avec les drogues dures.

Il aura aussi réussi à faire oublier certaines bourdes, comme ses propos vantant les cryptomonnaies ou attaquant le gouverneur de la Banque du Canada. C’est le signe d’un chef maintenant en pleine maîtrise de la situation.

Le message répété sans cesse par les Conservateurs à propos de l’abolition de la taxe carbone («Axe the tax») donne des résultats. Les baisses d’impôts et de taxes séduisent l’électorat. Plus que jamais? Peut-être. Si c’est le cas, c’est le résultat d’une campagne de communication conservatrice extrêmement efficace.

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Le Parti libéral comprend maintenant l’attrait des baisses d’impôts auprès de la population. Après avoir temporairement suspendu la taxe carbone sur le mazout dans les provinces de l’Atlantique l’automne dernier, voici qu’il suspend temporairement la TPS sur une grande quantité de produits durant deux mois.

Comme on le voit, le Parti conservateur est maintenant capable d’influencer les politiques du gouvernement libéral, sans être au pouvoir.

Le Nouveau Parti démocratique, grand perdant

Pendant plus de deux ans, le NPD a été le principal partenaire du gouvernement grâce à l’entente formelle signée avec les libéraux. Il pouvait ainsi imposer certaines de ses volontés.

Des projets de loi qui lui étaient chers ont ainsi été adoptés, comme l’assurance dentaire, l’aide au logement et plus récemment la loi anti-briseurs de grève et l’assurance médicaments.

En déchirant l’entente, le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a peut-être fait des gains à court terme, comme conserver la circonscription d’Elmwood–Transcona au Manitoba lors de l’élection partielle de septembre dernier.

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Mais la hausse de popularité tant espérée avec la fin de cette entente ne s’est jamais concrétisée. Le principal problème, c’est que Jagmeet Singh n’a jamais expliqué pourquoi son parti serait plus efficace s’il mettait fin à l’entente. D’autant plus qu’il refuse de renverser le gouvernement.

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Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh. Photo: Inès Lombardo, Francopresse

La patience du Bloc

Le Bloc québécois pourra dire que la patience a finalement porté ses fruits. Après avoir dû ronger son frein pendant plusieurs années, voilà qu’il peut maintenant marchander son appui auprès des autres partis. D’ailleurs, la rapidité avec laquelle il a présenté ses exigences au gouvernement illustrait bien qu’il a gagné en importance.

Par contre, cette influence est encore très théorique. Les Libéraux refusent de collaborer avec ce parti indépendantiste, qui est leur grand adversaire au Québec.

Ils ne sont pas seuls. Les Conservateurs, eux aussi, n’ont montré aucune ouverture à travailler avec les bloquistes pour défaire le gouvernement. Encore une fois, l’explication se trouve dans les intentions de vote au Québec.

Contrairement à ce qui se passe dans le reste du Canada, les Conservateurs ne dominent pas au Québec. C’est le Bloc qui est et demeure bon premier dans les intentions de vote. La personnalité de Pierre Poilievre serait la principale raison des déboires conservateurs dans cette province. On n’aime pas son ton trop agressif, voire abrasif.

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Pierre Poilievre, Parti conservateur
Le chef conservateur Pierre Poilievre. Photo: capture d’écran du canal parlementaire

Le principal défi de Pierre Poilievre

Le chef conservateur sera-t-il capable de changer de style au cours des prochains mois? La question se pose après qu’il a vécu l’une de ses pires semaines depuis qu’il est à la tête du Parti conservateur.

Beaucoup d’observateurs lui ont reproché de ne pas avoir eu à cœur les intérêts du pays depuis l’annonce fracassante du président désigné Donald Trump d’imposer des tarifs douaniers au Canada comme mesure de représailles face à l’immigration illégale.

Au lieu de se serrer les coudes avec le reste de la classe politique et aussi avec les milieux d’affaires, Pierre Poilievre a continué à attaquer les libéraux, soulignant la faiblesse du gouvernement Trudeau. Était-il nécessaire de donner des munitions supplémentaires au futur président américain?

Le rôle du chef de l’opposition officielle est double. D’une part, il a la responsabilité de surveiller le gouvernement et de lui demander de rendre compte de sa gestion. D’autre part, il doit se présenter comme une solution de rechange au gouvernement actuellement au pouvoir.

Au cours de la dernière année, Pierre Poilievre s’est très bien acquitté de son premier rôle, mais pas du deuxième. L’année 2025 sera celle où il devra montrer qu’il a l’étoffe d’un chef d’État. Qu’il a à cœur les intérêts de chaque personne au Canada, qu’elle ait voté pour lui ou non.

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Auteurs

  • Geneviève Tellier

    Professeure à l’École d’études politiques de l’Université d’Ottawa. Ses recherches portent sur les politiques budgétaires des gouvernements canadiens. Elle commente régulièrement l’actualité politique et les enjeux liés à la francophonie dans les médias.

  • Francopresse

    Le média d’information numérique au service de la francophonie canadienne, qui travaille de concert avec les journaux membres de Réseau.Presse.

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