Bashir Lazhar ou les accommodements raisonnables

Au Théâtre français et au Tarragon

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Publié 25/11/2008 par Guillaume Garcia

Comment s’intégrer dans une société qui n’est pas la sienne, comment faire pour concilier les valeurs issues de deux cultures différentes? Telles sont les questions qui hantent Bashir Lazhar, immigré algérien venu chercher l’asile politique au Canada. Évelyne de la Chenelière a tenté de coucher sur papier ce qu’elle percevait comme évolution dans la société canadienne et plus particulièrement, dans le milieu scolaire. Il faut croire que la pièce est toujours d’actualité puisqu’elle est jouée en anglais au Tarragon théâtre jusqu’au 7 décembre et elle sera à l’affiche du Théâtre français de Toronto du 26 au 30 novembre 2008.

Évelyne de la Chenelière voulait se lancer un défi, une envie en tant qu’auteure de tester une méthode d’écriture nouvelle, «de se dépayser un peu pour vérifier jusqu’où on peut se permettre d’écrire quand une réalité est loin de nous», précise l’écrivaine. Pour accoucher de cette pièce, elle a donc effectué des recherches et surtout fait fonctionner ses méninges: «Avec de l’imagination, de la recherche et de la compassion on peut vraiment parler de tout», constate-t-elle.

L’auteure explique qu’elle éprouvait une sorte de fascination pour la capacité des nouveaux arrivants à vivre au Canada. En 1999, lorsque lui vient l’idée d’écrire sur ce thème, elle n’imagine pas une seconde que sa pièce sera une belle réussite, aujourd’hui traduite en anglais, en espagnol et en allemand. Elle crée le personnage de Bashir Lazhar, immigré algérien qui se retrouve à enseigner devant une classe. Forcément, la méthode diffère un peu des canons de l’enseignement et de là en découle une situation qui nous questionne. La raison du succès selon l’auteure? «Cette histoire transcende la réalité, c’est avant tout une histoire humaine, celle d’un personnage qui essaie de renouer avec les autres à travers l’enseignement.»

Bashir Lazhar est sans conteste une pièce à portée politique, la première de l’écrivaine, qui avoue: «Je n’avais pas conscience que cela touchait à ce point les préoccupations des gens. Mais comme auteur, on a les sens très aiguisés envers ce qui se passe dans la société, c’est comme si on prenait le pouls de la société.» Pas de surprise donc de voir cette pièce toujours à l’affiche. La pièce jouée sous forme d’une fable engagée ne donne pas de leçons pour autant, «elle ne met pas en avant mes opinions», précise l’écrivaine.

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Si aujourd’hui Évelyne de la Chenelière voit les accommodements raisonnables comme «des questions qu’on se pose en tant que société ou jusqu’où peut-on faire exception à certaines lois pour accommoder certaines cultures ou religions dont certains principes vont à l’encontre de nos lois», elle reconnaît qu’elle ne connaissait pas ce concept en 1999, au moment d’écrire la pièce. Il faut croire que sa sensibilité ne l’a pas trompé puisque la pièce s’ancre toujours dans la réalité et il reste difficile de savoir quelle souplesse tolérer par rapport aux lois.

Quant à l’évolution des mentalités et du problème de l’intégration des immigrants, Évelyne de la Chenelière reste sceptique: «Depuis le 11 septembre, notre méfiance reste épidermique envers le monde arabe. Tout est exacerbé, notre perception fait qu’on mélange beaucoup le terrorisme et la religion musulmane. Je ne vois pas d’amélioration.» Bashir Lazhar pose des questions, mais ne donne pas de réponses. Chacun reste libre de trouver celles qui lui conviennent.

Info : www.theatrefrancais.com et www.tarragontheatre.com

Auteur

  • Guillaume Garcia

    Petit, il voulait devenir Tintin: le toupet dans le vent, les pantalons retroussés, son appareil photo en bandoulière; il ne manquait que Milou! Il est devenu journaliste, passionné de politique, de culture et de sports.

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