Art de vivre à la cour pontificale du XVIe siècle

Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 18/08/2009 par Paul-François Sylvestre

Le biographe d’un cardinal italien a déjà écrit que l’État ecclésiastique est une monarchie à l’intérieur de laquelle se trouvent «plusieurs espèces de Républiques» et où, «quoi que tout le pouvoir appartint à un seul, chaque Prince ne laisse pas d’y avoir sa petite cour et son autorité particulière». À quoi ressemblent la cour pontificale et les cours cardinalices au XVIe siècle? Voilà la question à laquelle répond Pierre Hurtubise dans Tous les chemins mènent à Rome: Arts de vivre et de réussir à la cour pontificale au XVIe siècle.

L’auteur explique en quoi consistaient ces cours, que en faisait partie, comment on y entrait, quels avantages on pouvait espérer en tirer et pourquoi on était à ce point attiré par elles. Pierre Hurtubise trouve réponse en consultant des documents d’époque souvent peu connus ou peu exploités: des rôles de cour, des livres de comptes, des registres de salaires, des cérémonials, des correspondances inédites et des traités qui leur sont contemporains.

On y apprend que, au XVIe siècle, Rome est l’une des villes les plus cosmopolites d’Europe. Ainsi, à la cour de Léon X (1513-1521), on comptait 59% de non-Italiens, soit 140 Espagnols, 123 Français, 88 Allemands, 35 Flamands, 28 Lorrains et 19 Suisses. Pas étonnant que Montaigne parle de Rome comme d’une «ville rapiécée d’étrangiers» où chacun «est comme chés soi».

Quelle langue parle-t-on à la cour pontificale au XVIe siècle? Il y a la langue officielle, le latin, qui sert à la fois de langue bureaucratique et de langue liturgique; et il y a le toscan qui est la langue de communication interne et externe des plus hauts échelons de la cour.

Le toscan est aussi la langue des représentations, comme en témoignent les spectacles présentés à cette même cour au profit du pape et de son entourage immédiat, mais également de ses hôtes habituels ou occasionnels.

Publicité

Pontificale ou cardinalice, une cour embauche nombre d’employés. Il y a ceux qui sont affectés aux «offices intimes»: auditeur, majordome, chambellan, premier secrétaire, chapelain, confesseur, médecin, barbier, etc.

Il y a ceux inscrits aux «offices de bouche»: maître de salle, maître d’hôtel, maître queux, pâtissiers, boulanger, sommelier, marmiton, acheteur ou dépensier. Pour les offices d’écurie, on trouve le maréchal ferrant, le cocher, les palefreniers, muletiers, âniers et charretiers. S’ajoutent le personnel de chasse, les vignerons, les jardiniers, le charpentier, le maçon et j’en passe.

Qu’est-ce qu’on mange à la table d’un cardinal? Avant de répondre à cette question, je dois préciser qu’un modeste repas peut facilement réunir 41 invités, soit 12 laïcs (ducs, comtes, marquis, gouverneurs, ambassadeurs) et 29 ecclésiastiques, dont 27 collègues du Sacré Collège.

La viande occupe une place de choix au menu. On y savoure régulièrement de l’agneau, du porc, du bœuf, du veau, du sanglier et du buffle; à l’occasion, on y déguste du chevreau, du pigeonneau, du dindonneau, des ris de veau et des saucissons. On évalue à 573 grammes la portion de viande que chaque invité mangeait en une journée.

Pierre Hurtubise note que les personnages, grands et petits, qui font partie des cours pontificale ou cardinalices, y trouvent pour la plupart profit et intérêt pour eux-mêmes et leur famille. On comprend dès lors pourquoi ces cours faisaient l’admiration et surtout l’envie de tant de contemporains qui étaient prêts à tout pour y accéder.

Publicité

Pierre Hurtubise, Tous les chemins mènent à Rome: Arts de vivre et de réussir à la cour pontificale au XVIe siècle, essai, Ottawa, Presses de l’Université d’Ottawa, 2009, 312 pages, 39 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur