Auteure d’une dizaine de recueils de poésie, Andrée Christensen est connue pour des textes qui font souvent appel à des faces cachées de la mythologie, desquelles elle dégage un traitement qui se loge presque toujours à l’enseigne du symbolique. Son premier roman s’intitule Depuis toujours, j’entendais la mer, et il emprunte le même parcours.
La mort occupe une place d’honneur dans cet ouvrage, à tel point que l’auteure doit inventer un genre littéraire pour mieux classer son livre; il s’agit d’un «roman-tombeau».
Le tout commence par une lettre et un colis que l’Ontarienne Andrea reçoit d’un cousin danois inconnu, un dénommé Thorvald Sorensen, mort depuis quelques jours. Le colis comprend des notes que Thorvald a rédigées tout au long de sa vie parsemée de morts.
Dans le sein de sa mère, Thorvald avait une sœur jumelle qui meurt à sa naissance et qui entraîne la mort de sa mère. On peut y voir un écho au recueil que l’auteure a signé en 1993: Pavane pour la naissance d’une infante défunte. Né dans une double mort, Thorvald est élevé par son oncle Erland, entrepreneur de pompes funèbres. Pour ce dernier, «les morts sont beaux, doux et sereins. […] Ils ne font de mal à personne. On ne peut pas en dire autant de bien des vivants.»
L’oncle demande à son jeune neveu de l’assister dans son travail, donc de côtoyer et apprivoiser la mort. Il lui fait comprendre que la vie naît constamment de la mort. La nature lui sert d’exemple puisque les bêtes mortes nourrissent les insectes qui meurent ensuite, se décomposent, puis nourrissent en sels minéraux les plantes; «c’est la mort qui façonne la vie».