Ado défigurée par un ours: le regard qui compte est transcendant

ado défigurée, Leanne Baugh, L’histoire sur mon visage
Leanne Baugh, L’histoire sur mon visage, roman traduit de l’anglais par Michel Rudel-Tessier, Montréal, Éditions Hurtubise, 2021 342 pages, 24,95 $.
Partagez
Tweetez
Envoyez

Publié 01/08/2021 par Paul-François Sylvestre

Chez les ados, l’apparence physique revêt parfois une importance démesurée. Mais quel est l’impact d’un extérieur soudainement défiguré sur le regard des autres et son propre regard sur soi? Leanne Baugh répond à cette question dans le roman intitulé L’histoire sur mon visage.

La narratrice est Abby Hughes, 17 ans, élève de Rocky View High School à Calgary. En 11e année, elle menait la vie d’une ado jolie et ordinaire. Puis, durant l’été, Abby subit l’attaque d’une ourse grizzly dans les montagnes Rocheuses.

Son visage devient méconnaissable. Réseau de cicatrices. Joue concave. Œil droit presque entièrement recouvert par sa paupière. Front enfoncé. Plus bas, trois balafres: une sur son sein gauche et deux juste au-dessus, là où le grizzly a presque réussi à lui ouvrir la poitrine.

Défigurée : harcèlement et intimidation

Après sept chirurgies pour redonner forme un tant soit peu à son visage, Abby décide de retourner en classe. Elle est timidement accueillie par la plupart de ses anciennes amies, voire carrément dénigrée par deux gars.

Sur la porte de son casier, ils écrivent en stylo-feutre ces mots: «Fast-food pour ours».

Publicité

Ce n’est que la pointe de l’iceberg, côté harcèlement et intimidation.

La romancière montre comment à quel point les ados peuvent être incroyablement, cruels, méchants et machiavéliques. Leurs gestes, ici, prennent un tournant dangereux. Au point où Abby en vient à souhaiter que l’ourse l’ait achevée.

Les vrais prédateurs sont les humains

Or, le problème ne se situe pas au niveau de l’attaque d’un grizzly. Il réside plutôt chez les gens qui entourent Abby. «Les humains sont devenus mes prédateurs, et ils sont sans pitié.» Ça commence par un regard en coin, puis des yeux ronds, ensuite une moue dédaigneuse.

L’ado suit des thérapies de groupe et apprend peu à peu à arrêter d’avoir peur de la vie, à mettre un frein pour que son accident cesse de drainer toute son énergie.

Forte, courageuse… angoissée

Une trans lui confie qu’il faut restez fidèle à ce qu’on est profondément. Se foutre complètement de l’avis des autres. La vie est trop courte pour s’en soucier, clame la trans. «Soyez vous-même. Vivez votre vie en dolby surround sound. Vous le méritez.»

Publicité

Abby doit se rappeler constamment ce leitmotiv: «Je suis forte. Je suis courageuse. J’ai confiance en moi.» Mais souvent, cela devient: «Je suis forte. Je suis courageuse. Je suis… sérieusement angoissée.»

Publié aux Éditions Hurtubise, L’histoire sur mon visage est un roman qui ne se nourrit pas d’une vaine pitié, mais plutôt d’une sublime piété du regard intérieur. Celui qui compte, qui soutient, qui transcende.

Leanne Baugh est née à Calgary (Alberta) et vit présentement à Victoria (C.-B.) lorsqu’elle ne se plaît pas à parcourir le vaste monde. The Story of My Face, son premier roman, a paru en 2018 et est traduit par Michel Rudel-Tessier.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

Partagez
Tweetez
Envoyez
Publicité

Pour la meilleur expérience sur ce site, veuillez activer Javascript dans votre navigateur