Trump pense être le seul à posséder la vérité

et que ses opposants n'ont pas droit d’avoir recours aux avocats de leur choix

Trump
Avec son autoritarisme, le président américain Donald Trump est-il devenu un nouveau Roi-Soleil?
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Publié 26/11/2025 par Gérard Lévesque

Dans le texte Développements inquiétants pour la primauté du droit, nous avons présenté un exemple où l’administration américaine attaque des membres de la magistrature. Aujourd’hui, nous attirons votre attention sur un cas où le président Donald Trump attaque tous les employés d’un cabinet juridique.

L’ordonnance du 6 mars 2025 cible le cabinet d’avocats Perkins Coie LLP. Trump critique ce cabinet pour avoir représenté Hillary Clinton et pour avoir des politiques internes qui encouragent la diversité au niveau du recrutement.

L’ordonnance a pour effet de limiter l’accès du personnel de Perkins aux édifices gouvernementaux, de suspendre les contrats gouvernementaux de Perkins et de suspendre les autorisations de sécurité du personnel de ce cabinet.

Quand un ou une juriste se fait refuser l’entrée d’un édifice gouvernemental pour représenter ses clients à une rencontre, on peut s’imaginer facilement les préjudices financiers subis par son cabinet. Leurs clients se tournent immédiatement vers un autre cabinet qui n’est pas dans la mire du président.

Le cabinet Perkins conteste la constitutionnalité de cette ordonnance.

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Beryl A. Howell
La juge Beryl A. Howell.

Le 2 mai dernier, la juge fédérale Beryl A. Howell, de la Cour du district de Columbia, rend un jugement de 102 pages. Elle débute sa décision en indiquant qu’aucun président américain n’a émis d’ordonnance comme celle-ci ciblant un cabinet d’avocats prestigieux.

Elle est d’avis qu’il s’agit d’une inspiration de l’œuvre Henri VI de William Shakespeare, où un leader rebelle qui espère devenir roi, reçoit le conseil suivant: «la première chose à faire est de tuer tous les avocats».

Les conséquences de s’opposer au président

Selon la juge Howell, l’ordonnance exécutive transforme la citation de Shakespeare en prenant l’approche «tuons tous les avocats que je n’aime pas», ce qui envoie un message clair: les avocats doivent suivre la politique du président, sinon ils vont subir les conséquences. 

La juge constate que l’importance d’avoir des avocats indépendants pour assurer un système judiciaire juste et une administration impartiale de la justice a été reconnue depuis le début des États-Unis. Elle rappelle que, dans son ouvrage De la démocratie en Amérique, publié en 1835, le politicien français

Alexis de Tocqueville note que l’autorité qu’on accorde aux membres de la profession légale est la barrière la plus puissante qu’on puisse opposer aux écarts de la démocratie.

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La juge annule l’ordonnance 14230 de l’exécutif parce que celle-ci viole la Constitution américaine. Aucune surprise de constater que Trump en appelle de cette décision.

Cet exemple peut paraître extrême, mais il se produit chez nos voisins du Sud que quelques mois après l’entrée en fonction du nouveau gouvernement.

Les citoyens de tous les pays démocratiques ont intérêt à suivre de près ce genre de développements et d’apprendre à identifier rapidement des tendances susceptibles d’être beaucoup plus subtiles que celle-ci, mais qui pourraient mettre à risque les institutions démocratiques.

De la démocratie en Amérique
De la démocratie en Amérique, d’Alexis de Toqueville.

La Cour a beaucoup d’amis

Un ami de la cour est une personne ou une organisation qui intervient dans un litige sans être partie au procès. Son rôle est d’apporter des informations ou des opinions utiles au tribunal pour aider à la prise de décision.

Pour vous donner une idée de la charge de travail imposée à la juge présidant ce dossier, il faut savoir qu’en plus de la volumineuse documentation déposée par les deux parties, il y a un mémoire d’un ami de la Cour en appui du gouvernement, déposé au nom de trois groupes de promotion des droits des propriétaires d’armes à feu, et trois groupes de tendance conservatrice.  

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Il y a également vingt-deux mémoires d’amis de la Cour en appui de la partie demanderesse (le cabinet Perkins) déposés par un vaste éventail de cabinets juridiques, d’organisations de juristes, de professeurs de droit, d’anciens juges fédéraux et d’anciens juges des états, d’organismes en faveur de l’administration de la justice, de la liberté de la presse et des libertés civiles. 

Auteurs

  • Gérard Lévesque

    Avocat et notaire depuis 1988, ex-directeur général de l'Association des juristes d'expression française de l'Ontario. Souvent impliqué dans des causes portant sur les droits linguistiques. Correspondant de l-express.ca, votre destination pour profiter au maximum de Toronto.

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