Le ROM lève le voile sur la culture de Trypilia qui régnait en Ukraine il y a 6 000 ans

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Publié 02/12/2008 par Khadija Chatar

Mercredi dernier, c’était l’effervescence au Musée Royal de l’Ontario (ROM), situé au 100 Queen’s Park. L’exposition Les mystères de l’Ukraine ancienne: la remarquable culture de Trypilia a été inaugurée en grande pompe avec la présence de la première dame d’Ukraine, Mme Kateryna Iouchtchenko.

«Nous sommes sincèrement reconnaissants envers nos partenaires du Musée de nous avoir aidés à montrer, enfin, cette civilisation ukrainienne», disait la première dame, avant de souligner que cette civilisation existait avant le temps des Pharaons, des Grecques et des Mésopotamiens.

Ainsi, les visiteurs peuvent depuis samedi dernier, 29 novembre, découvrir aux côtés des gigantesques squelettes de dinosaures et des murs ornés de fossiles à n’en plus finir, de nombreux ustensiles et autres objets utilisés par cette civilisation matriarcale très ancienne qui a existé entre 4500 – 2700 avant J.-C.! On s’interroge ainsi sur ce qui a empêché cette civilisation si vieille et si riche d’avoir été exposée, plus tôt,à la lumière du jour comme cela a été le cas avec l’histoire des pharaons, par exemple?

Une civilisation jalousée par Moscou

Étouffée d’abord par les Soviets, ensuite laissée aux oubliettes, la découverte des vestiges de Trypilia, en 1896, par M. Khivoika, a provoqué un premier temps l’envie et la jalousie de ses voisins. Selon M. Temerty, président du Conseil de Northland Power, la société commanditaire de l’exposition, dans les années trente, surtout, où de plus en plus d’archéologues se sont intéressés à cette ville, berceau de cette civilisation disparue, les Soviets ont utilisé les grands moyens pour empêcher la médiatisation de Trypilia. Moscou aurait assassiné plusieurs chercheurs avant d’isoler les sites découverts. Le plus intriguant dans cette exposition, mis à part la personnalité qui l’a inaugurée, ce sont les nombreux vestiges qui y sont exposés.

Ceux-ci sont le conte d’une civilisation où le noyau de la société était la femme! Un système qui a dû bien fonctionner puisqu’il a perduré pendant des millénaires. S’en est suivi le mode patriarcal, plus connu, des Indo-Européens.

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La spiritualité chez les Trypiliens était ainsi caractérisée par la présence de déesses et non de dieux. De nombreuses vitrines du musée contiennent un nombre impressionnant de statuettes identiques représentant des courbes féminines. «Les hanches sont très marquées. Cela fait référence à la fertilité de la femme mais aussi de la terre, car il s’agissait d’une société principalement agraire, dit M. Lavoie, porte-parole de l’exposition. On suppose également qu’il y avait des autels de prières dans toutes les maisons, ce qui expliquerait la taille de ces figurines».

L’exposition La remarquable culture de Trypilia étonne, également, par le foisonnement de ses objets à utilité culinaire et de conservation d’aliments! Des petits pots, des jarres, des plats…. occupent la majorité de l’exposition. Ensuite, la découverte de fusaïoles constitue l’empreinte de l’activité de tissage. Une occupation caractéristique d’une société riche et qui confirme aussi la place dominante que tenait la femme.

Une société égalitaire

Le climat aurait eu une importance primordiale dans la structure sociale trypilienne. Ainsi, cette civilisation, qui a connu les plus grands centres de peuplement à cette époque, aurait évolué dans un environnement chaud et humide favorable à la moisson. «On suppose que les cités étaient peuplées d’au moins 15 000 habitants», déclare M. Temerty. Dans une reconstitution d’un village, il est surprenant de voir que les habitations étaient similaires de par leur taille. Pour la plupart des chaumières, elles démontrent, par la même occasion, qu’il s’agissait d’une société très égalitaire. «On ne voit aucun château ou demeure plus grande que les autres», observe M. Lavoie.

Pas loin de ce village miniature, une maquette représentative d’une habitation nous révèle comment ces gens vivaient. Ainsi, les constructions étaient à deux étages. Sagaces, les Trypiliens plaçaient leur bétail au rez-de-chaussée durant la nuit pour profiter de la chaleur qu’il dégageait. «Les femmes s’occupaient de la cuisine, de la poterie et du tissage et les hommes de la chasse du gibier, de la cueillette et de la construction. On sait aussi qu’en raison d’un climat favorable, l’agriculture était largement pratiquée. Les femmes ont su ainsi domestiquer certaines plantes. Un savoir-faire qui a dû faire d’elles des membres importants du village», poursuit M. Lavoie.

Mais ce qui est assez étrange, c’est d’apprendre que ce peuple semi-sédentaire brûlait ses terres avant de se déplacer vers de nouvelles. «Nous n’avons aucune explication sur ce comportement», regrette M. Lavoie. La disparition de cette civilisation reste tout aussi mystérieuse. Certaines hypothèses avancent que ce peuple aurait été remplacé par les Indo-Européens, qui à cette époque avaient envahi les steppes d’Est en Ouest; ou encore que le climat plus sec aurait provoqué l’effacement progressif de la sylvo-steppe en faveur de la steppe. Des théories difficilement vérifiables mais qui, pourtant, permettent, pour l’instant, de comprendre cette civilisation.

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Les vestiges de Trypilia sont au Musée jusqu’au 22 mars prochain. 300 artéfacts, c’est plus qu’assez pour que chacun se fasse sa propre opinion sur les modes de vie de cette civilisation ancienne et pourtant encore méconnue du grand public.

Pour obtenir plus d’informations visitez le site www.rom.on.ca

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