Budget 2024: Ottawa garde une petite place pour la francophonie

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Le gouvernement libéral a déposé son 8e budget depuis son entrée au pouvoir en 2015. Photo: Julien Cayouette, Francopresse
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Publié 16/04/2024 par Chantallya Louis

Malgré un budget fortement axé sur le coût de la vie et le logement, la francophonie se fraie une place modeste dans le budget fédéral 2024-25. Le gouvernement de Justin Trudeau renforce la protection de certains droits en matière de langues officielles et accroit la traduction au sein des organismes publics.

À plusieurs reprises dans le document de plus de 450 pages, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, rapporte que son gouvernement veut protéger les droits en matière de langues officielles.

Dans cette optique, 26 millions $ seront versés sur cinq ans au ministère du Patrimoine canadien, au Secrétariat du Conseil du Trésor et au Commissariat aux langues officielles afin d’appuyer la mise en œuvre de la Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada.

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Chrystia Freeland prévoit que les frais de la dette publique s’élèveront à 54,1 milliards $ en 2024-25. Photo: Julien Cayouette, Francopresse

Accroître la capacité de traduction

À partir de l’année fiscale 2024-2025, le gouvernement fédéral propose une enveloppe de 31,9 millions $ sur cinq ans au Bureau de la traduction de Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC). L’objectif est d’accroître la capacité de traduction et d’interprétation au sein du Parlement. Trois millions de dollars seront versés annuellement après 2028-2029.

Bien que le document précise que la pénurie de main-d’œuvre et le manque de ressources ont mis «à rude épreuve les services de traduction, mettant en péril la capacité des gens à participer à la démocratie», le plan n’établit pas comment le montant permettra d’augmenter le nombre d’interprètes et de traducteurs dans la sphère politique fédérale.

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Toutefois, le gouvernement propose d’ajouter à cette enveloppe 1,1 million $ sur cinq ans à compter de 2023-25 et 200 000 par la suite pour établir un programme de bourses d’études au sein de SPAC. «Le financement proviendra de ressources existantes du ministère», précise-t-on dans le budget.

Le gouvernement prévoit également d’investir 9,6 millions $ sur trois ans pour le Service administratif des tribunaux judiciaires, à compter de 2024-25, pour accroître sa capacité à fournir des décisions traduites au sein des juridictions fédérales.

Par ailleurs, parmi les mesures législatives annoncées, le gouvernement fédéral propose de modifier la Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada «afin de corriger une erreur technique qui empêcherait les personnes salariées, éventuelles et anciennes, de porter plainte auprès du commissaire aux langues officielles», promet le budget.

budget fédéral 2024-25
Le document principal de 483 pages du budget fédéral 2024-25. Deux autres documents l’accompagnent: un énoncé de 40 pages sur «l’égalité entre les genres, la diversité et l’inclusion», et 80 pages de renseignements supplémentaires sur les mesures fiscales.

Culture et médias

Un montant de 10 millions $ sur trois ans sera ajouté au Fonds du livre du Canada afin de promouvoir davantage les auteurs et autrices au pays et à l’étranger. Le Fonds est géré par Patrimoine canadien, qui déterminera s’il y aura une portion réservée pour les livres en français hors Québec.

Aucune nouvelle mesure n’est proposée pour les médias autres que CBC/Radio-Canada. La société d’État pourrait bénéficier d’un investissement supplémentaire de 42 millions $ cette année «pour les émissions d’actualité et de divertissement».

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Même si on indique que ce financement donnera accès à des émissions pour tous, «y compris les communautés rurales, éloignées, autochtones et de langue minoritaire», la portion pour la programmation en français en milieu minoritaire reste à préciser par le diffuseur public.

Patrimoine canadien disposera, pour sa part, de 15 millions $ supplémentaires pendant deux ans pour appuyer les services de programmation d’intérêt public.

La chaîne de télévision parlementaire CPAC recevra quant à elle 5 millions $ en 2024-25 pour appuyer ses besoins en capital. Les 10 millions $ restants seront distribués à des services comme TV5 Québec Canada et le Réseau de télévision des peuples autochtones (RTPA).

Radio-Canada
L’édifice de CBC et Radio-Canada au centre-ville de Toronto

Améliorer les services dans les communautés rurales

Le gouvernement tente d’attirer plus de diplômés dans le domaine de la santé et les services sociaux dans les régions rurales et éloignées.

Le programme d’exonération de remboursement de prêts d’études canadiens sera étendu aux spécialistes de la santé qui choisissent de pratiquer hors des grands centres. Les métiers ciblés incluent les dentistes, les pharmaciens, les sages-femmes et les psychologues.

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Le personnel enseignant fait également partie de cette liste. Les éducatrices de la petite enfance, les médecins et le personnel infirmier avaient déjà droit à une exonération.

Le gouvernement estime que les nouveaux métiers ajoutés à la liste lui coûteront 253,8 millions $ sur quatre ans, à compter de 2025-26, et à 84,3 millions $ par la suite.

Cependant, le budget ne présente aucun plan pour promouvoir ces services en français dans les communautés francophones en milieu minoritaire.

Augmenter les bourses d’études

Quelques mesures dans le budget visent à faciliter l’accès aux études postsecondaires.

Le gouvernement prévoit rendre permanente la hausse des bourses d’études canadiennes, qui était passée de 3000 $ à 4200 $ pour l’année 2023 à 2024 pour les étudiants dans le besoin.

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De plus, «à compter de 2028-29, un régime enregistré d’épargne-études serait ouvert automatiquement pour tous les enfants admissibles nés à partir de 2024, et les paiements admissibles du Bon d’études canadien y seraient déposés automatiquement», est-il écrit.

Depuis 2004, les parents devaient ouvrir un Régime enregistré d’épargne-études (REEE) pour recevoir la contribution du gouvernement, qui peut aller jusqu’à 2000 dollars.

Selon ses estimations, le gouvernement croit qu’il devra investir 161,9 millions $ sur cinq ans à compter de 2024-25 et 148,8 millions $ par la suite pour remplir les demandes de Bon d’études.

budget fédéral 2024-25
Des prévisions de revenus de 497,8 milliards $ et de dépenses de 534,6 milliards $ en 2024-25.

Les grands oubliés francophones du budget

Lors de sa campagne électorale en 2021, le premier ministre Justin Trudeau avait promis une enveloppe de 80 millions $ par année pour les établissements postsecondaires francophones en situation minoritaire.

Dans le cadre du Plan d’action pour les langues officielles, lesdits établissements recevront un financement de 128 millions $ sur quatre ans.

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Même si elle reste satisfaite de l’annonce, l’Association des collèges et universités de la francophonie canadienne (ACUFC) croit à l’importance de respecter la promesse initiale pour contrer le sous-financement de ses membres.

«Le 32 millions $ [par année] pour 4 ans, c’est loin de ce que la promesse avait formulé», avait lancé Martin Normand, directeur de la recherche stratégique et des relations internationales de l’organisme en septembre dernier.

Malgré les nombreuses mesures annoncées par le gouvernement, entre autres pour la construction de plus de logements, la défense nationale et l’intelligence artificielle, le gouvernement prévoit un déficit de 39,8 milliards $.

Cependant, les frais de la dette publique s’élèveront à 54,1 milliards $, une augmentation par rapport aux projections de l’énoncé économique de 2023, qui s’élevait à 52,4 $.

– Avec la collaboration de Julien Cayouette

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Auteurs

  • Chantallya Louis

    Journaliste pour Radio-Canada, Francopresse et aujourd'hui Le Droit à Ottawa. Diplômée en Études internationales, Langues modernes, Entrepreneuriat social et Administration publique. Elle parle français, anglais, espagnol et créole haïtien.

  • Francopresse

    Le média d’information numérique au service de la francophonie canadienne, qui travaille de concert avec les journaux membres de Réseau.Presse.

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