La nouvelle Promenade Champlain: redonner le fleuve aux Québécois

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Publié 08/07/2008 par Charles-Antoine Rouyer

La nouvelle Promenade Samuel-de-Champlain est le cadeau de la Province du Québec à la ville de Québec pour son 400e anniversaire. Inauguré le 24 juin 2008, ce présent vient s’ajouter au parc des Plaines d’Abraham, cadeau du 300e, et de la Promenade des gouverneurs, cadeau du 350e, dons du palier fédéral.

Ce superbe parc linéaire de 2,5 kilomètres de long s’étire sur les berges du Saint-Laurent, au pied de la falaise. Les 200 000 m2 d’espaces verts sont principalement lovés dans le creux de deux longues courbes, aménagées au sein d’un nouveau boulevard urbain spécialement redessiné, en remplacement d’une ancienne autoroute qui longeait la berge.

Le parc affiche de nombreuses interventions paysagées et sculpturales tout au long du site. Il abrite comme de raison un sentier de promenade de deux kilomètres qui ondule au fil de l’espace. Une piste cyclable traverse également le parc. Elle se prolonge jusqu’à Québec, pendant 6 km aux abords du fleuve et s’inscrit même dans la Route verte, voie cyclable à l’échelle de la Province.

Quelques abris de bois clair à la ligne très épurée viennent rythmer l’espace, ici et là. Installés au bord de l’eau, ils invitent à faire une pause, contempler le fleuve majestueux et l’axe de communication primordial aux débuts de la Nouvelle-France. Ces petits bâtis assurent du même coup une continuité visuelle d’un bout à l’autre de la promenade, qui se décline en trois parties distinctes.

Les cageux: ouvriers des chantiers navals

La Station des Cageux est la première partie de la promenade, à l’entrée Ouest du parc. Elle évoque l’industrie du bois et la construction navale, omniprésentes jadis dans cette ancienne zone industrielle de l’arrière-port de Québec. Des milliers d’ouvriers, les cageux, travailleront ainsi sur ces terres pendant près d’un siècle.

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Dès les premiers mètres, le Quai des Cageux s’avance dans l’eau, perpendiculaire au rivage, comme les quais d’antan. Au bout se dresse une ravissante tourelle de poutrelles de bois, à l’image des bois équarris et poutres des navires en construction. Au sommet, un étage d’observation offre une vue imprenable sur toute la promenade qui s’étire le long du croissant de la baie au Foulon.

Sur le quai, un centre d’interprétation évoque le lointain passé industriel, qui fit la fortune de la ville à ses débuts.

Dans le parc, une zone humide s’allonge en croissant le long du fleuve, alors qu’au Nord du boulevard, le secteur de la côte Ross intègre le boisé de Tequenonday où trône un belvédère accessible par de grands escaliers.

Au centre de la promenade, la Station des sports s’étend de part et d’autre du boulevard. Au Nord, deux terrains de soccer ont été aménagés sur d’anciens terrains décontaminés à la pile biologique. Des réservoirs de pétrole occupèrent un temps cette partie du site industriel.

Les humeurs du Saint-Laurent

La promenade se termine par la station des Quais, le bouquet final, avec ses quatre quais, évoquant les humeurs du fleuve, parmi 80 000 m2 de pelouses ourlées qui ondulent telles des vaguelettes vertes. Ces quais sont ici davantage des jardins thématiques, car ils ne s’avancent pas dans l’eau. Ce sont plutôt de longues bandes rectangulaires qui se déroulent depuis la berge et entrecoupent le parc

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Le Quai-des-Brumes s’étend de part et d’autre du boulevard. Le plus spectaculaire artistiquement parlant, il affiche de superbes œuvres sculpturales en granit sombre et des diffuseurs de bruine.

Le Quai-des-Flots est le plus paysagé des quatre quais, avec notamment ses futurs grands arbres.

Le Quai-des-Hommes est le plus sobre, mais peut-être le plus séduisant : une longue promenade de bois clair qui se termine par une paroi de bois dressée dans les airs, un bout de quai à la verticale.

En contrebas, l’intervention la plus subtile mais la plus symbolique et ingénieuse du parc : un escalier de quelques simples marches de béton se termine les pieds dans l’eau. Les promeneurs peuvent ainsi s’approcher du fleuve mythique, jusqu’à y tremper les mains et toucher ce géant, longtemps l’artère principale au cœur de la vie de la province (prolongé plus tard par la voie ferrée.)

Enfin, le Quai-des-Vents vient conclure ce quatuor de la vie du fleuve. Plus intime, il est entouré de longues herbes et particulièrement contemporain, avec de longs mats blancs dressés et coiffés d’une feuille métallique délicatement posée au sommet en équilibre.

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Seule ombre au tableau, le parc est légèrement excentré de la ville et accessible seulement en voiture. Une navette par autobus desservira le site depuis Québec, jusqu’au 31 octobre 2008. Espérons ensuite que la ville saura mettre en place un service régulier. Sinon la promenade deviendra le parc d’une minorité aisée, les Québécois de la Haute Ville, qui possèdent une voiture.

Au final, la Promenade de Champlain est un parc linéaire extrêmement séduisant, tout en nuances. Assurément contemporain et à la fois profondément teinté d’histoire, l’espace vert affiche de superbes interventions paysagées et artistiques, tout en restant parfaitement accessible au commun des mortels et répondant à diverses fonctions.

La Promenade Champlain semble donc tenir son pari: «redonner le fleuve aux Québécois», 400 ans après que le Saint-Laurent ait donné vie à la ville, offrant même son nom à la romantique Québec: Kebek, là où le fleuve se rétrécit, en Algonquin.

Note: le gouvernement fédéral, n’est pas en reste pour ce 400e et offre à la Ville de Québec le Pavillon du 400e, agrandi et rénové; la jetée et le centre d’interprétation du Bassin Brown (ancien site industriel entre Québec et la Promenade Champlain); le réaménagement de la Baie de Beauport et l’Agora de Beauport (un amphithéâtre extérieur) Rens.: www.quebec400.gc.ca

www.monquebec2008.com et Espace 400e: 100, quai Saint-André.
www.promenade2008.qc.ca et www.capitale.gouv.qc.ca/chantiers/parcs-espaces-verts/promenade-samuel-de-champlain.html
– Le Louvre à Québec: www.mnba.qc.ca
– Location de vélo et visites guidées à vélo: www.cycloservices.net
– Le Musée du fort, www.museedufort.com et L’Odyssée du Musée des plaines d’Abraham, www.ccbn-nbc.gc.ca/_fr/odyssecanada.php, deux musées excellents pour réviser son histoire en audiovisuel,
– L’observatoire de la Capitale, un étage d’observation à 360 degrés, au plus haut sommet de Québec, www.observatoirecapitale.org
– Urbanopolis, excellente exposition sur l’évolution de la ville
et son futur, www.mcq.org
– Hôtels: Québec est la ville où sont nés les hôtels boutiques, qui offrent souvent de meilleurs prix (petit-déjeuner compris) que les grands hôtels, dont certains n’ont de grand que le nom. Gare aux mauvaises surprises…

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Un site symbolique teinté d’histoire

La Promenade Samuel-de-Champlain se déroule entre le fleuve et les falaises, deux éléments naturels qui résument somme toute la naissance, l’essor et finalement la chute de la ville.

Le site s’avère donc particulièrement judicieux pour ce cadeau du gouvernement provincial via la Commission de la capitale, célébrant 400 ans de vie francophone en Amérique du Nord – et non pas la naissance du pays, le Canada (bien plus tard, en 1867), comme aimerait le faire croire le gouvernement fédéral à l’occasion de ce 400e.)

Au fil de ces quatre siècles, la Vieille Capitale sera tour à tour, le Gibraltar de l’Amérique du Nord, le berceau de la culture française en Amérique, puis l’orpheline du Royaume de France, elle est aujourd’hui un joyau du patrimoine mondial de l’UNESCO avec sa vieille ville.

Le fleuve: à l’origine de la fondation de Québec par Samuel de Champlain en 1608. Il donnera aussi son nom à la ville : Kebek, qui signifie en Algonquin « là où le fleuve se rétrécit », soit l’endroit où le fleuve Saint-Laurent devient bien plus étroit, moins d’un kilomètre, et donc facilement contrôlable du haut de la falaise par des canons.

La falaise: la fin de la chaîne des Laurentides, l’épine rocheuse sera elle aussi à l’origine de la fondation de la Ville, pour le lieu stratégique qu’elle offrait. Québec domine ainsi le fleuve du haut du Cap diamant. La ville forme alors le verrou sur la porte d’entrée de la Nouvelle-France et de tout le Nord du continent, d’où son surnom de Gibraltar d’Amérique du Nord.

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Cette falaise est historique aussi, car c’est le rempart de protection naturelle qu’escaladeront 150 ans plus tard, en pleine nuit, les troupes britanniques du Général Wolf, un triste 13 septembre 1759. (Les soldats emprunteront la coulée d’un cours d’eau, aujourd’hui la Côte Gilmour, qui mène au début du parc des Plaines d’Abraham, presque à mi-chemin entre la nouvelle Promenade Champlain et la Vieille Ville.)

En ce matin de 1759, les troupes françaises du général Montcalm seront en déroute en moins d’une demi-heure, en rase campagne, sur les terres d’un dénommé Abraham. Le sort du berceau de la culture française en Amérique est jeté. Le reste de la Nouvelle-France et ses nombreux forts (dont le Fort Rouillé de Toronto) tomberont comme des dominos.

La ville et la Province deviennent orpheline. (Québec sera toutefois reprise aux Anglais le printemps suivant par les troupes françaises venues de Montréal. Mais la ville sera finalement abandonnée lorsque les premiers navires de renfort au printemps 1760 battent pavillon anglais…)

Depuis, isolée, l’irréductible poche francophone dans un continent anglophone a su résister à l’assimilation culturelle et reste le berceau de la culture française en Amérique du Nord, né il y a 400 ans, le 3 juillet 1608.

Cet article a été réalisé grâce à la participation de Tourisme Québec et de la Société du 400e.

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