C’est une bonne façon d’écrire un roman

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Publié 27/03/2007 par Paul-François Sylvestre

Il y a des romans qui regorgent d’intrigues et de -rebondissements. Il y a des romans où rien ne se passe, où tout dépend du regard, du ton de la voix, du geste subtil ou incisif. Ce n’est pas une façon de dire adieu, nouveau roman de Stéfani Meunier, se situe peut-être entre ces deux pôles. L’action est au rendez-vous, mais à petite dose. L’auteure se révèle plus une magicienne des atmosphères qu’un as de l’intrigue.

Stéfani Meunier situe ses personnages dans le New York des années 1970. Il y a Ralf qui vit dans un appartement à Brooklyn, avec un chien qui s’appelle Lennon, comme un des Beatles. Il y a Sean, musicien canadien qui joue à New York et qui crèche chez Ralf. Puis il y a Héloïse que Ralf rencontre dans une boutique et dont il devient amoureux.

Chaque chapitre est écrit au «je» et il faut parfois plusieurs lignes avant de savoir lequel des trois personnages se raconte. C’est une bonne façon d’écrire un roman.

Tel que mentionné plus tôt, le roman ne regorge pas de rebondissements retentissants. Les personnages se retrouvent souvent dans des bars, vibrent au son de Sgt. Pepper’s ou Sexy Sadie, et trinquent allègrement. La romancière décrit avec minutie tout ce qui entoure ses personnages: un regard capté en passant, quelques accords de musique, les paroles d’une chanson qui montent aux lèvres, un cœur qui chavire.

Après avoir rencontrer Ralf, Héloïse ne tarde pas à s’installer chez lui. Petit à petit, Héloïse change: «je n’étais plus moi-même. Peut-être que c’était normal, que c’était ce que ça faisait, de vivre avec quelqu’un. On essayait de plaire, de cacher ses imperfections, on était influencé par le caractère de l’autre. Et on finissait par devenir l’autre.» Au début de la relation, ce genre de symbiose ressemble à une forme de bonheur.

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Ralf a l’art de mijoter des soupers où se conjuguent amour et amitié. Puis Héloïse profite d’une scène érotique pour proposer un voyage en Bretagne. Voyage qui est vécu différemment par l’une et l’autre. L’équilibre du couple ne tarde pas à devenir précaire.

Dans la vie, faut-il continuer à s’évertuer, à courir après les choses qui ne nous satisferont plus une fois que nous les auront? Voilà la question que l’auteure pose entre les lignes. Autrement dit, pourquoi la réalité n’est-elle jamais à la hauteur? Pourquoi?

Lorsque Sean part en voyage pour jouer dans un bled sur une île perdue, il se rend compte que le quatuor joue ensemble, mais séparément. Il découvre aussi que le fait de vivre isolément, sur une île, accentue certaines choses, les rend plus présentes, donc plus évidentes. Comme il n’y a que la mer autour, ce qu’une personne garde à l’intérieur d’elle-même n’en devient que plus présente. C’est ce genre de relief extraordinaire que l’auteure a l’art de donner au quotidien de ses personnages.

Les Beatles chantent Let It Be, mais dans la vie, le laisser-faire n’est pas toujours la meilleure recette. Il faut parfois poser des gestes drastiques. C’est ce qu’un personnage croit, décidant de s’éclipser à tout jamais du trio Ralf-Héloïse-Sean. «Rester et partir, parfois, c’est la même chose. Ça dépend de comment on le fait.»

La romancière Stéfani Meunier a raconté une histoire où les digressions et parenthèses abondent. Chacune devient une occasion en or de dévoiler une facette du vécu quotidien des gens ordinaires. Les sentiments et les mots coulent de manière limpide et nous ensorcellent.

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Stéfani Meunier, Ce n’est pas une façon de dire adieu, roman, Montréal, Éditions du Boréal, 2007, 216 pages, 22,95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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