L’écriture dense et intense de Daniel Castillo Durante

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Publié 28/11/2006 par Paul-François Sylvestre

Daniel Castillo Durante a été finaliste du Prix Christine-Dumitriu-Van-Saanen pour son roman intitulé La passion des nomades. L’auteur d’origine argentine enseigne les lettres françaises à l’Université d’Ottawa depuis une dizaine d’années. Pour lui, la fiction littéraire est un lieu dans lequel l’amour et la mort peuvent encore, main dans la main, nous révéler la passion comme premier moteur de l’humain.

Le roman primé s’ouvre sur le meurtre du consul argentin à Montréal. Son fils Gabriel apprend la nouvelle et s’envole vers la métropole québécoise dans l’espoir de comprendre ce qui s’est passé. Il rencontre des gens de diverses origines culturelles, ce qui n’est pas surprenant puisque l’auteur s’intéresse aux rapports conflictuels qui existent entre l’étranger et la société d’accueil. Gabriel rencontre surtout Ana, dernière maîtresse de son père, dont il s’éprend assez rapidement.

Le lecteur apprend assez tôt que les relations entre le père assassiné au Québec et le fils nouvellement arrivé à Montréal, étaient tantôt froides, tantôt tendues. D’après le consul, «le malentendu était le seul lien possible entre père et fils». Cette formule imaginée par l’auteur illustre bien son style finement ciselé.

Daniel Castillo Durante a développé le goût pour les expressions décapantes. Il écrit, par exemple, que «se servir exclusivement d’une langue, c’est se condamner à faire l’amour avec une seule femme». Durante prend plaisir à jouer avec les mots, ce qui le pousse à lancer ce commentaire on ne peut plus suave: «j’ai passé une nuit blanche avec une Noire dans mon lit».

Revenons aux protagonistes du roman. Lorsque Gabriel apprend qu’Ana et son père n’ont jamais été faits «l’un pour l’autre mais plutôt l’un contre l’autre», il veut l’épouser. Il est prêt à dire le fameux «Oui, je le veux, jusqu’à ce que la mort nous sépare». Mais pour Ana, qui a une conscience criminelle, Gabriel se trompe, car c’est la mort qui unit le fils à l’ex-maîtresse. Qu’on le veuille ou non, tout n’est-il pas question de stratégie en amour? C’est bien ce qui semble se passer dans cette étrange relation sur laquelle planent les tisons de l’amour et les braises de la mort.

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La passion des nomades est un roman dont l’architecture émane d’un plan classique en ce qui a trait à la manière de camper les personnages, mais d’une approche fort moderne en ce qui a trait au dénouement de l’intrigue. Pour Durante, la vérité est un mythe car, plus souvent qu’autrement, l’être humain n’a accès qu’à des points de vue partiels. Cette situation incite le romancier à faire le constat suivant: «quand on perd de vue d’où l’on est, le lieu où l’on va s’efface également».

Ce roman fait preuve d’une écriture à la fois dense et intense. Il se veut ni plus ni moins l’éloge du regard posé par celui qui vient d’ailleurs, par le nomade. Gabriel incarne l’être qui scrute le présent, écartelé entre deux points de fuite qui s’enfoncent dans des directions s’éloignant l’une de l’autre.

Daniel Castillo Durante, La passion des nomades, roman, Montréal, XYZ éditeur, 2006, 228 pages, 24 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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