Yann Tiersen : «On ne peut pas vivre sans la Terre»

En concert à Toronto ce lundi 20 mai avec son dixième album mystique

Yann Tiersen, musicien breton, présentera son nouvel album à Toronto.
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Publié 15/05/2019 par Léa Giandomenico

C’est depuis son studio sur l’île d’Ouessant que Yann Tiersen a enregistré son dernier album, All. Savant mélange de mélodies pianistiques, de chœurs bretons et de sons naturels, il plonge l’auditeur dans une douce torpeur. Le musicien brestois l’interprétera au Queen Elizabeth Theatre ce lundi 20 mai.

Lumière sur le monde

Avec All, Yann Tiersen tend à apporter un regard nouveau sur l’environnement qui l’entoure. «Je voulais un titre compréhensible en anglais et en breton.» En effet, all, «tout» en anglais, signifie «autre» en breton. Cette idée d’altérité, de double sens, lui plaisait fortement et permettait de mettre en lumière la dimension holistique de l’album.

Yann Tiersen affirme son amour pour la nature dans son dernier album.

Plongée au cœur de la nature

Un ancien aéroport près de Berlin, la Redwood Forest à Devon, en Angleterre : voici deux des endroits où Yann Tiersen a capté des sons pour les incorporer à son album. C’est ainsi que chants d’oiseaux, rires d’enfants, et textes déclamés en breton se mélangent harmonieusement aux mélodies instrumentales.

Le musicien, connu pour la bande-originale du film Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, place la nature au centre de sa musique.

«La nature est la chose la plus importante. Aujourd’hui, nous vivons déconnectés de notre réalité, loin de la Terre qui nous porte. Les hommes meurent par méconnaissance de l’environnement dans lequel ils évoluent», explique le musicien qui souhaite rompre avec cette vision.

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Rencontre avec un puma

En effet, Yann Tiersen a eu un déclic, 4 ans auparavant, en se retrouvant nez à nez avec un puma alors qu’il traversait la Californie à vélo, accompagné de sa femme.

«Ce jour-là, nous avons failli mourir. Nous étions perdus au milieu de nulle part, nous ne connaissions pas les règles de l’endroit où nous nous trouvions, qui vivait là, et c’est à cause de cette stupide méconnaissance que nous aurions pu y rester.» Cet événement a changé sa vision du monde.

Un dixième album aux intonations mystiques.

Symbolique forte

L’aéroport de Tempelhof, où il a procédé à des enregistrements de terrain pour certains de ses titres, signifiait beaucoup pour le compositeur.

«Les aéroports représentent tout ce que la civilisation produit de pire, des centres commerciaux par lesquels on est obligé de passer pour consommer encore et encore: l’horreur!»

Yann Tiersen explique que Tempelhof est devenu l’inverse: un lieu alternatif que les Berlinois ont décidé de laisse tel quel, en friche, depuis sa fermeture. «Les familles y viennent le dimanche, des réfugiés s’y trouvent aussi, la nature est telle quelle: l’herbe pousse sur les pistes à présent. En bref, c’est un lieu vivant, un beau symbole pour moi.»

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«Mon île coule dans ce que je fais»

 

Désormais, il tend à partager cet amour de la nature qui le porte au quotidien. «J’ai envie d’être le plus honnête possible dans ma musique, de partager l’endroit où je vis.»

Le musicien affirme que Ouessant est un endroit où la nature est très présente. «Elle est très forte dans sa démesure et dans son pouvoir salvateur. Je tends à partager cet aspect dans ma musique. Mon île fait partie de moi.»

«En breton, on est avec les choses, on ne les possède pas»

 

Voix féminines et chœurs d’hommes ponctuent les compositions de Yann Tiersen… en breton. Cette langue, centrale dans la vie du compositeur, lui permet de s’exprimer comme il l’entend.

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«Nous vivons à une époque où nous avons la chance de pouvoir parler des langues internationales: l’anglais, le français nous permettent de communiquer avec le monde entier. Or dans les langues natives, dont fait partie le breton, on trouve la clé de la compréhension de l’endroit où l’on est», explique-t-il en insistant sur l’héritage énorme laissé par cette langue ancienne.

Le musicien avoue avoir toujours été frustré par la langue française, avec laquelle il ne parvenait pas à véhiculer ses pensées. «J’ai pris une année sabbatique pour apprendre le breton: cela m’a réconcilié avec l’expression orale. Je suis plus serein, plus calme désormais. J’apprécie mieux le français et j’arrive à m’exprimer comme je l’entends.»

Il explique par exemple qu’en breton, le verbe avoir n’existe pas, et est remplacé par le verbe être. Ces différences permettent une forme nouvelle d’expression.

L’Eskal, studio d’enregistrement Ouessantin du musicien, est un projet novateur.

Composer autrement: le projet Eskal

C’est dans une ancienne discothèque de l’île d’Ouessant que Yann Tiersen a enregistré son album. Ce lieu, l’Eskal, s’est transformé en studio, mais aussi en salle de concert, et en lieu où l’on peut apprendre le breton.

«Cet endroit est très important, des générations de Ouessantins se rencontraient ici. Je voulais faire un studio sur l’île où j’habite, et c’est devenu un beau projet, plus large encore.»

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Le musicien explique vouloir aller à l’inverse des studios d’enregistrement habituels. «On peut tout faire avec un téléphone aujourd’hui, tout retoucher jusqu’au dernier moment. Je voulais trouver le moyen d’être maître de mes choix, de prendre des décisions plus brutes, un chemin plus tracé.»

Toronto: passage obligé

Habitué des tournées internationales, Yann Tiersen passe par Toronto pour la promotion de chacun de ses albums. Il apprécie le public canadien.

Rendez-vous au Queen Elizabeth Theatre le 20 mai prochain, à 19h. Billets en vente ici.

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