Votre application préférée est peut-être financée par l’Arabie Saoudite

Si les investisseurs de la Silicon Valley se souciaient vraiment des droits humains, ils feraient davantage que de snober un congrès.(Photo: Pixnio.com / CC)
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Publié 26/10/2018 par Pascal Lapointe

Quel pays est devenu récemment l’un des plus gros investisseurs de la Silicon Valley? L’Arabie Saoudite.

Dilemme pour les PDG qui aimeraient faire sentir leur colère face à un régime qui persécute les dissidents et est accusé d’avoir torturé, tué et démembré un journaliste… mais qui déverse des milliards de dollars dans leur cour.

Le royaume a toujours soigné ses liens avec les politiciens et les lobbyistes de Washington, à travers ses ventes de pétrole et ses achats d’armes. Mais ces dernières années, note dans le New York Times l’auteur Anand Giridharadas, il avait commencé à déplacer plusieurs de ses investissements de Wall Street vers les compagnies de technologie de la Californie.

Sous l’égide du nouveau prince héritier Mohammed ben Salmane, qui fut pendant un moment qualifié de «réformiste», le mouvement s’est accéléré.

Uber, WeWork, Slack

Son Public Investment Fund, par l’intermédiaire d’un fonds japonais d’investissement dans les technologies, serait devenu, entre autres, le principal actionnaire d’Uber, et un soutien financier majeur pour plusieurs jeunes pousses allant de WeWork (location d’espaces partagés) à Slack (messagerie).

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Lors de sa visite en Californie en avril dernier, Salmane a pu être vu, tout sourire, en compagnie des Zuckerberg (Facebook), Brin (Google) et Bezos (Amazon, propriétaire du Washington Post).

Boycott du Davos du désert

La mystérieuse disparition du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, qui était entre autres chroniqueur au Washington Post et qui pourrait avoir été assassiné le 2 octobre au consulat saoudien d’Istamboul, en Turquie, s’est révélée suffisamment gênante pour que plusieurs de ces entrepreneurs annulent leur participation au sommet Future Investment Initiative, surnommé «le Davos du désert», et qui doit avoir lieu à la fin du mois dans la capitale saoudienne.

Officiellement, plusieurs disent se mettre en retrait en attendant les résultats de l’enquête, mais officieusement, ils sont à présent confrontés à un régime qui, selon les mots du réseau CNN, représentait pour ces entrepreneurs «une aubaine, et est devenu un mal de tête».

Le congrès pourrait devenir un «fiasco», écrivait vendredi soir The Guardian. Mais il n’est que la partie visible de l’iceberg, ajoute le chroniqueur Theodore Schleifer dans le magazine de l’économie numérique Recode. «Si les investisseurs de la Silicon Valley se souciaient vraiment des droits humains, ils feraient davantage que de snober un congrès.»

Auteur

  • Pascal Lapointe

    Journaliste à l'Agence Science-Presse, média indépendant, à but non lucratif, basé à Montréal. La seule agence de presse scientifique au Canada et la seule de toute la francophonie qui s'adresse aux grands médias plutôt qu'aux entreprises.

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