Victoire massive de François Legault: nouvelle ère politique

Comme Doug Ford en Ontario le 2 juin, François Legault a été réélu au Québec le 3 octobre avec une majorité accrue. Il a été plébiscité lui aussi pour sa gestion de la pandémie. Et il a sûrement bénéficié de l’immense visibilité qu’elle lui a accordée au détriment de ses adversaires.

Mais là s’arrête la comparaison.

Les plaques tectoniques n’ont pas bougé en Ontario. Néo-Démocrates et Libéraux, qui se choisiront bientôt de nouveaux chefs, représentent toujours l’alternance traditionnelle aux Conservateurs.

Quatre oppositions

Au Québec, c’est plus fluide. Dans l’opposition à la Coalition Avenir Québec du premier ministre, qui a fait élire 90 candidats sur 125 avec 41% du vote, quatre partis bataillaient ferme pour rester ou devenir l’alternative crédible dans quatre ans.

Les Libéraux de Dominique Anglade, plus que jamais cantonnés dans le Montréal anglophone, demeurent l’opposition officielle avec 21 sièges et 14% des suffrages, le pire score du parti de Jean Lesage et de Robert Bourassa depuis trois-quarts de siècle.

Le rôle de véritable opposition est cependant revendiqué par Québec solidaire de Gabriel Nadeau-Dubois, qui semble plafonner avec 11 sièges et 15% du vote, mais pour qui ont voté beaucoup de jeunes. En réalité, QS s’incruste.

Nouvel axe gauche-droite

On peut même envisager que l’ancienne rivalité souverainiste-fédéraliste PQ-PLQ, qui a duré quatre décennies, est déjà remplacée par une rivalité conservatrice-socialiste CAQ-QS qui sera peut-être aussi durable.

Né autour d’enjeux socio-économiques, QS s’est muté avec succès en parti vert martelant la nécessité d’agir face à la «crise climatique».

Paul St-Pierre Plamondon cherchait à relancer le Parti québécois de René Lévesque et de Lucien Bouchard. Il n’a obtenu que 3 sièges, mais un respectable (dans les circonstances) 15% du vote. Sa présence à l’Assemblée nationale sera un atout précieux qui pourrait permettre au PQ de… ne pas disparaître.

Feu de paille conservateur?

C’est exactement ce qui fera cruellement défaut au Parti conservateur qu’Éric Duhaime a réinventé, mais que le mode de scrutin a défavorisé. Lui aussi souhaite bâtir sur ses 13% des suffrages, notamment dans la grande région de Québec.

On verra si ce n’était qu’un feu de paille dans le contexte de la pandémie, ou si il y a un marché politique au Québec pour le privé en santé et un régime minceur pour la bureaucratie.

Nouveau mandat

François Legault paraissait soulagé que prenne fin cette campagne où il a été malmené par ses quatre adversaires et ses propres gaffes à tous les tournants.

Il n’en demeure pas moins que le premier ministre remporte une victoire historique, avec une solide équipe d’élus ministrables. Dans son discours, lundi soir, il a souligné qu’un nombre record de femmes ont été élues à l’Assemblée nationale.

Humaniser le système de santé et perfectionner le système d’éducation (les deux plus gros ministères des gouvernements provinciaux au Canada) font partie des priorités de son nouveau mandat, a-t-il dit.

Il propose aussi de réconcilier croissance économique et protection de l’environnement, un projet qui interpelle toutes les générations, selon lui.

Enfin, François Legault a répété en anglais qu’il se voulait «le premier ministre de tous les Québécois». C’est une formule éculée, reprise par tous les gagnants de toutes les élections. Mais dans ce Québec moderne à cinq courants politiques très distincts, elle prend tout son sens.

Taux de participation à ces élections québécoises: 66%. En Ontario le 2 juin: 43%.