Une vie en quête de sens

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Publié 17/03/2009 par Paul-François Sylvestre

La Franco-Ontarienne Marie Gingras publie son premier roman qui s’intitule Anatomie d’un suicide et autres mensonges. Écrivaine à ses débuts, elle pratique sa profession de psychologue depuis longtemps et peut-être s’est-elle inspirée de son parcours professionnel pour brosser le portrait d’un homme introspectif et analytique «au boutte», résolu à s’enlever la vie. Pas tout de suite. Il a d’abord plusieurs choses à vous raconter.

Cet homme de 50 ans vit à Ottawa et, au printemps 2007, il décide de poser le geste irréparable. Une invitation sous-tend sa démarche: lecteurs et lectrices sont priés de le suivre dans son récit d’enfant mal aimé, d’adolescent désabusé, d’adulte tenaillé par l’angoisse, d’homme qui devient, presque malgré lui, le héros de son propre roman.

«Que vous le vouliez ou non, nous sommes maintenant partenaires dans toute cette histoire, enfin, jusqu’au moment où vous déciderez d’arrêter de jouer» (de fermer le livre).

L’homme rédige ses carnets autobiographiques et s’adresse régulièrement à ceux et celles qui le lisent: «Vous êtes encore là? Eh bien, tant pis pour vous. Je vous averti, les choses ne vont pas aller en s’améliorant.» Il a déjà raconté comment il n’a jamais été doué pour le bonheur et comment la vie est «une longue digression entre la naissance et la mort».

Il a noirci des pages et des pages sur sa difficile socialisation avec les autres écoliers et a consacré tout un chapitre à la masturbation. Il a décrit ses furtives conquêtes féminines et a raconté comment et pourquoi il est devenu traducteur. Il n’a pas oublié de mentionner qu’il passait tout son temps à se sauver: «de mes collègues, de ma solitude, de ma mère, de mon appartement, de moi-même, de mes thérapeutes, de mes angoisses, de ma blonde du moment…»

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Il écrit «blonde du moment», mais je dois dire que cet homme a traversé des périodes romantiques assez intenses où il nageait «dans le plein bonheur ou dans la pleine négation, ce qui revient probablement au même».

Parallèlement à ces moments d’euphorie relative, notre quinquagénaire navigue entre cures de désintoxication, cours de métaphysique, séances de méditation transcendantale et régimes macrobiotiques ou autres.

J’ai oublié de vous dire que, au tout début du récit, notre homme aux pensées suicidaires avait mis en garde les lecteurs et lectrices de ne pas s’attacher à lui.

Est-ce possible qu’il se soit fait prendre à son propre jeu, qu’il se soit attaché à lui-même…? Toujours est-il qu’Anatomie d’un suicide et autres mensonges va bien au-delà du simple récit de la souffrance pour embrasser un champ plus large, plus noble, celui de la quête de sens. L’intrigue proposée nous fait marcher sur un fil, en équilibre précaire au bord du gouffre.

Comme le roman se passe à Ottawa, en partie durant les années 1960, et que j’ai fréquenté l’Université d’Ottawa à cette époque-là, j’ai bien aimé plonger dans des lieux d’action familiers: le quartier Côte-de-Sable, le marché By, le Café Wasteland, le restaurant Nate’s, le Cinéma Bytowne. Je dois aussi avouer que le style de narration adopté par Marie Gingras m’a énormément plu. (Cela m’a même donné des idées pour mon prochain roman…)

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Marie Gingras, Anatomie d’un suicide et autres mensonges, roman, Gatineau, Éditions Vents d’Ouest, coll. Azimuts, 2008, 208 pages, 21.95 $.

Auteur

  • Paul-François Sylvestre

    Chroniqueur livres, histoire, arts, culture, voyages, actualité. Auteur d'une trentaine de romans et d’essais souvent en lien avec l’histoire de l’Ontario français. Son site jaipourmonlire.ca offre régulièrement des comptes rendus de livres de langue française.

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