Née en Italie, élevée et éduquée au Québec, Bianca Zagolin est professeure de littérature et traductrice. Elle vient de publier un roman intitulé L’Année sauvage, une histoire dense et pleine d’émotions. Les peines et les joies du quotidien se côtoient, se croisent et sont décrites avec la même sensibilité et la même intelligence de l’âme humaine.
L’action de L’Année sauvage se déroule dans un petit village des Cantons de l’Est. Dès les premières pages, on apprend que la petite Catherine est disparue. Enlèvement, crime sordide? Les recherches restent vaines. Pour la mère, Josette, seule la souffrance va désormais tenir lieu d’existence. La trame romanesque ne se limite pas à cette tragédie, loin de là.
L’auteure fait intervenir quatre autres personnages, deux hommes et deux femmes, dont le destin s’entrecroise au rythme des saisons. Une année au fil de laquelle chacun découvrira un univers parallèle, peuplé d’étrangeté et d’enchantement. C’est ce savant déroulement qui confère au roman toute sa dynamique et qui le rend attachant.
Les quatre autres personnages sont Sophie et son mari Charles, du même village, leur amie Cécile, de Montréal, et l’Amérindien Thomas qui vit aux abords du village, dans un autre univers. Alors que Josette attend qu’il arrive quelque chose pouvant «opérer un charme et conjurer le malheur», Cécile rend visite à son amie Sophie, dont les jours sont comptés. Son mari Charles met tout en œuvre pour que le malheur ne finisse pas par devenir sournois, par engourdir le corps et suffoquer l’esprit. Thomas, qui semblait avoir l’œil sur Josette, rencontre Cécile et une vérité pressentie prend dès lors forme. «Une faible pression s’exerce sur (leur) conscience en éveil, le sang afflue à fleur de peau.»
La romancière décrit avec doigté la nouvelle existence de ses personnages, celle qui se définit désormais par l’expression «il y a l’avant et l’après». Elle sait doser l’imprévu de sorte qu’il fasse basculer l’existence pour lui donner «un sens malgré les résistances et les protestations». Le résultat est assez étonnant. Le lecteur navigue ni plus ni moins sur une mer mi-turbulente mi-paisible, sur «une zone de convergence où les vies s’interpénètrent dans la douleur et le ravissement».